"C’est sans doute aussi la difficulté, l’impossibilité à admettre que le visage que l’on présente d’Israël dans ce rapport soit le vrai, le bon, le juste. La raison et le cœur ne peuvent l’admettre. Ils préfèrent l’ignorer. Ce visage-là, défiguré, ce n’est pas nous, ce n’est pas le nôtre; voilà ce que signifie la réaction israélienne unanime, confirmée par les réactions officielles du pouvoir comme de l’opposition."
"Certes, il y a une exception de taille à ce tableau idyllique : le rapport Goldstone. Contredisant la prétention israélienne à mener une guerre juste et propre, ce rapport accablant estime que l’intervention israélienne à Gaza fut particulièrement sale et a frappé indistinctement, au-delà du tolérable, militaires et civils." (2 mars 2010)
Le Centre Communautaire Laïc Juif (CCLJ) de Belgique publiait le 3 novembre 2009 une analyse de son politologue attitré
Denis Charbit intitulée
Goldstone : Un pavé dans la mare. Alors que de nombreuses voix s'étaient élevées pour pointer les graves erreurs qui émaillent le rapport, Denis Charbit faisait totalement confiance au rapport et accablait, lui aussi, Israël qu'il invitait à se justifier et à se repentir. Récemment le
Juge Richard Goldstone s'est rétracté dans un journal américain, et, malgré le tort et le mal qu'il a provoqué, son courage lui fait honneur. Extraits du billet de Charbit :
"La publication du rapport Goldstone suite à l’intervention de Tsahal à Gaza en décembre 2008 a été très mal accueillie par l’opinion publique israélienne qui refuse de mettre en doute les agissements de ses soldats. Explication de cette unanimité israélienne face à la condamnation internationale.
La surprise désagréable pour mes concitoyens [l'auteur vit en Israël et parle donc en bon connaisseur du pays] qu’a révélée la publication du rapport Goldstone, c’est évidement la constatation de l’abîme de plus en plus profond qui sépare le sentiment collectif de l’opinion israélienne de la réaction internationale officielle dont on peut craindre qu’elle ne finisse par imprégner les opinions publiques. Cet écart est inquiétant. Il attise, du coté israélien, les soupçons d’une vaste conspiration antisémite et, de l’autre, accrédite l’idée qu’Israël fait figure d’Etat d’exception. [...]
Une commission indépendante
C’est sans doute aussi la difficulté, l’impossibilité à admettre que le visage que l’on présente d’Israël dans ce rapport soit le vrai, le bon, le juste. La raison et le cœur ne peuvent l’admettre. Ils préfèrent l’ignorer. Ce visage-là, défiguré, ce n’est pas nous, ce n’est pas le nôtre; voilà ce que signifie la réaction israélienne unanime, confirmée par les réactions officielles du pouvoir comme de l’opposition. Tout au plus, certains prennent du recul par rapport à cette ligne pour estimer qu’Israël a commis une lourde erreur en refusant de se présenter devant la commission pour apporter son témoignage et équilibrer la représentation unilatérale de l’opération puisqu’au final les membres de la Commission n’ont entendu grosso modo qu’un seul point de vue. Ce refus a priori ne traduit pas seulement la défiance traditionnelle d’Israël vis-à-vis des instances internationales; on ne peut pas s’interdire de penser qu’Israël pressentait les résultats de l’enquête et préféra que la commission Goldstone établisse son rapport sans qu’elle puisse se prévaloir de la coopération israélienne. Pour l’heure, la seule concession entendue dans le débat public concerne l’exigence présentée à Israël de procéder à sa propre enquête à condition qu’elle ne soit pas confiée à Tsahal. Le dilemme n’est pas mince : créer cette commission, c’est admettre que les enquêtes auxquelles Tsahal avait procédé n’avaient aucune valeur; refuser de le faire, c’est prendre le risque que la Cour internationale de La Haye n’en soit saisie. [...] il est bon qu’une commission judiciaire prenne le relais du gouvernement pour rendre son verdict indépendamment des pressions intérieures et extérieures exercées pour qu’elle blanchisse ou noircisse Israël.