mercredi 24 août 2011

Sur Arte: «Modus operandi: l’Holocauste belge» d’Hugues Lanneau

Source: Véronique Chemla 

Arte diffusera les 24 et 30 août 2011 «Modus operandi :l’Holocauste belge», documentaire réalisé par Hugues Lanneau et dont la narratrice est Marthe Keller. Ce film retrace l’histoire, dans le royaume de Belgique, des Juifs lors de la Seconde Guerre mondiale : des persécutions antisémites nazies à leur déportation en 26 convois et à la Shoah, via leurs diabolisation, exclusions, recensement et spoliations. Il décrit le contexte politique et le rôle de l’administration –police, justice– et des médias dans cette mécanique implacable.

Modus operandi, l’Holocauste belge «expose comment la machine antisémite nazie s'est mise en mouvement en Belgique à partir de mai 1940, de façon inexorable, menant à la déportation à Auschwitz de près de 25 000 Juifs, soit près de la moitié de la population Juive belge de l'époque, suivant les registres établis par les nazis. A peine 5% en sont revenus». Parmi ces victimes, le peintre Félix Nussbaum (1904-1944) et son épouse Felka.

Mai 1940. L’armée allemande envahit la Belgique lors d’une Blitzkrieg.
Les dirigeants nazis bénéficient de la collaboration de fonctionnaires et d’élus, nationaux et locaux, convaincus que l’obéissance à l’occupant allemand est «le moindre mal».

Une mécanique répressive antisémite se met en place: interdiction d’exercer certains métiers et de fréquenter certains lieux publics, recensement dans le «Registre des Juifs», port obligatoire de l’étoile jaune dès 1942, vols des «entreprises juives», expropriation de biens mobiliers et immobiliers, «convocations pour la "mise au travail à l'Est" délivrées par l'AJB (Association des Juifs de Belgique, créée par les Allemands), rafles à Bruxelles et Anvers dès août-septembre 1942, arrestations des Juifs de nationalité belge dès septembre 1943 puis déportation vers Auschwitz» de 24 916 adultes et enfants Juifs entre 1942 et 1944 – 1 206 reviendront des camps -, etc. L’administration belge va non seulement appliquer les directives de l’occupant nazi, mais parfois les devancer.
Les journaux autorisés par l’occupant nazi jouent un rôle majeur dans cette diabolisation des Juifs en titrant «Le venin juif», «Qu'on mette les Juifs dans des camps de concentration!», «L'Allemagne déjudaïsée est un pays heureux»…

Une résistance belge s’organise avec notamment le Comité de Défense des Juifs.
Des différences cependant sont liées aux spécificités belges. le roi Léopold III demeure en Belgique après la capitulation en mai 1940 -un gouvernement dirigé par Hubert Pierlot prend la route de l’exil vers la Grande-Bretagne–; les divisions entre Wallons et Flamands; la police des étrangers a demandé à chaque personne de fournir une photo, un portrait pour constituer son dossier. Ce sont ces photos des Juifs étrangers que montre ce film pour humaniser des statistiques.
A la Libération, nombre de fonctionnaires bénéficient de non-lieux ou de remises de peines.
Ce n’est qu’à l’aube du XXIe siècle, après les travaux de la Commission dite Buysse, que la Belgique accorde des réparations matérielles aux victimes de la Shoah, institue un fonds financé par les autorités publiques et des institutions financières.
Ce documentaire alterne images d’archives et des témoignages d’une dizaine de survivants, sur une voix off neutre de la comédienne Marthe Keller. Pour la première fois, ces évènements tragiques de l’histoire de la Belgique étaient traités en 2008 sur grand écran, et dans une sortie importante en salles.
Cette histoire concerne aussi l’histoire de la France : près de 300 Juifs d’Anvers ont été déportés au camp (Judenlager) des Mazures, dans les Ardennes françaises, où ils furent contraints au travail forcé : «237 sont morts ensuite à Aschwitz-Birkenau, Bergen-Belsen, Buchenwald, Dachau, Flossenbürg, Mauthausen, Natzwiller, Teresienstadt, 27 survécurent aux camps, 2 furent fusillés en Belgique après évasion, 22 réussirent leur évasion».
  
« Modus operandi : l’Holocauste belge » d’Hugues Lanneau
Production : Les Films de la Mémoire
Belgique, 2008
98 minutes
- 24 août 2011 à 20 h 40
- 30 août 2011 à 9 h 55

 Visuels : © DR

4 commentaires :

Gilles-Michel DEHARBE a dit…

D'Anvers à Auschwitz en quatre étapes :

* Le 18 juillet 1942, un convoi de déportés part d'Anvers pour Revin. Tous ces "porteurs de l'étoile" sont obligés de construire leur Judenlager aux Mazures.

* Le 24 octobre 1942, 240 juifs des Mazures sont renvoyés en Belgique, au Centre de rassemblement de la Caserne Dossin (Malines). Ils sont mis de force dans le Convoi 15 pour Auschwitz.

* Le 4 janvier 1944, le Camp des Mazures est vidé de ses derniers juifs. Ils ne sont pas dirigés sur la Belgique mais à Drancy où ils se trouveront inclus au Convoi 66 pour Auschwitz.

* Après Les Mazures, 231 déportés juifs sont morts dans les Camps d'extermination, à commencer par Auschwitz. 26 y ont survécu.

Gilles-Michel DEHARBE a dit…

Initiatives belges relatives
à l’Holocauste (1997 - 2009)

http://kanselarij.belgium.be/fr
/binaries/Brochure_FR_tcm170-101434.pdf

prof a dit…

Merci à Gilles-Michel Deharbe pour les liens concernant les initiatives belges relatives à l'Holocauste (entre nous, je préfère le terme Shoah).

JEA a dit…

Jean-Emile ANDREUX. Six ans furent nécessaires pour sortit de l'oubli l'histoire du Judenlager des Mazures - et de trois Justes reconnus depuis par Yad Vashem pour avoir sauvé des évadés de ce camp pour juifs originaires d'Anvers.
Au nombre de mes publications : un "Mémorial" reprenant les destin de chacun de ces déportés mais aussi de leur compagne et de leur(s), enfant(s) aux Ed. de l'Université de Lille 3...
Je retrouve ici des extraits in extenso de mes travaux. Sans référence aucune.
Voilà qui est regrettable. Si le travail de mémoire importe, son auteur n'a pas à être "oublié" à son tour...