mardi 26 juin 2012

"Pour moi mon beau-fils est juif même s'il est musulman et arabe"

Source: Tundra Tabloids (Vignettes about Amsterdam anti-Semitism)

Dans le cadre d'un livre qu'il a écrit sur l'antisémitisme aux Pays-Bas, le politologue Manfred Gerstenfeld a interviewé Charles Dahan, un négociant en vins. Charles Dahan est né Maroc qu'il a quitté en 1956 pour la France à l'âge de vingt ans. Après son mariage avec une Juive néerlandaise il s'est installé à Amsterdam.

Pour M. Dahan l'antisémitisme est présent dans la communauté musulmane et affecte également la population "de souche".  Voici quelques "petites histoires ordinaires" qu'il a vécues à Amsterdam.

In vino veritas. Un médecin qui vivait dans sa rue lui rendait souvent visite pour boire un petit verre. Un jour le médecin lui parle du mariage de sa fille avec un Arabe irakien: "Ma fille a ramené un Juif à la maison". M. Dahan s'étonne: "Comment pouvez-vous dire que c'est un Juif? Il s'agit d'un musulman, irakien et arabe. Pourquoi dites-vous qu'il est juif?" Pour le médecin, qui savait que M. Dahan est juif, ces considérations ne comptaient pas: "Pour moi ils [Juifs et Arabes] se valent. Pour moi c'est un juif." Il avait bu un verre de trop.

Dahan raconte une autre anecdote. Il avait un client qui était grossiste en textiles et qui lui achetait du vin en gros. Chaque fois qu'un client se rendait chez lui, le grossiste débouchait une bouteille avant d'entrer dans le vif du sujet. Le client buvait et achetait. C'était bon pour les affaires des deux.

Un jour, il s'est rendu chez Charles Dahan en compagnie de trois ou quatre amis. Après avoir bu, il ont commencé à entonner des chants nazis. Il s'est avéré qu'ils avaient tous été des collaborateurs nazis.

"Ce grossiste en textiles était très poli. J'ai une mezouzah sur ma porte. La première fois qu'il m'a rendu visite il a demandé 'Avez-vous acheté cet appartement à un Juif?'. Je lui ai répondu 'Je ne sais pas qui était le propriétaire précédent ni s'il était juif'. Il a pointé la mezouzah et observant: 'Seuls les Juifs mettent ça sur leur porte'.  Alors, je lui ai dit: 'Je suis juif et c'est moi qui l'ai mise là'.  Ça ne le dérangeait pas. Il trouvait mes prix et mes vins attractifs. Quand il venait me voir il buvait autant qu'il voulait. Mais dès qu'il était saoul il disait très très clairement ce qu'il pensait. Je n'ai plus jamais fait des affaires avec lui."

Il y a une quinzaine d'années, Charles Dahan louait un entrepôt dans le port d'Amsterdam pour stocker son vin. Un Hollandais avait un entrepôt à côté du sien et chaque fois qu'il le voyait il lui demandait: "Alors vous n'avez pas encore décidé de partir pour Israël?" Il lui a demandé pourquoi il lui posait la question.  L'autre avait une explication: "Parce que j'ai besoin de votre entrepôt". Puis un jour il lui a dit: "Les Juifs n'ont rien à faire en Israël, Israël appartient aux Arabes".


Dahan conclut: "Ce sont des petites histoires d'Amsterdam".

1 commentaire :

Anonyme a dit…

* Compte-rendu sur l'antisémitisme en Hollande – 2011

http://antisemitism.org.il/article/72989/compte-rendu-sur-lantis%C3%A9mitisme-en-hollande-%E2%80%93-2011

La réalité de l’antisémitisme aux Pays-Bas aujourd’hui correspond à ce qui se passe dans toute l’Europe. L’antisémitisme est en croissance et ses sources sont multiples. Il ne se limite pas à la communauté musulmane. Il est beaucoup plus diffus au sein de la population néerlandaise " de souche ". Si l'antisémitisme trouve sa source à l'extrême-droite, de nombreux préjugés antisémites circulent sur Israël et les Juifs au sein de l’extrême- gauche, qui par le passé était plutôt favorable à Israël. Les églises peuvent également faire preuve d’hostilité à l’égard d’Israël. Personne n’est obligé d’être pro-israélien et on a le droit de critiquer Israël, mais le problème se situe dans la manière avec laquelle on formule cette critique. Je pense que beaucoup de Néerlandais étaient devenus pro-israéliens par sentiment de culpabilité suite à la Shoah. Les Juifs étaient perçus comme l’incarnation universelle de la victime de la barbarie.

Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, ils incarnent plutôt la figure de l’oppresseur. Beaucoup de gens ont du mal à envisager les Juifs comme un groupe humain ordinaire où l’on trouve des brillants et des médiocres, des intelligents et des idiots, des gentils et des méchants ... On est passé d’une extrême à l’autre. Paradoxalement, la vie n’a jamais été aussi bonne pour les Juifs aux Pays-Bas. Si l’on compare la situation actuelle avec celle des années 1930, c’est radicalement différent. Quant à l’émigration vers Israël, on s’aperçoit qu’à peine 52 personnes ont quitté les Pays-Bas l’an passé. Et l’antisémitisme ne fait pas exclusivement partie de leurs motivations de départ.

Les Juifs doivent comprendre qu’ils affronteront périodiquement des vagues d’antisémitisme parfois violentes et préoccupantes quant au contenu idéologique. La vie des communautés sera marquée par des éruptions d’antisémitisme suivies d’accalmies. Ce fut le cas des Juifs tout au long de leur histoire, il n’y a rien de neuf.