mardi 29 novembre 2011

Les Arabes 'baisaient trois fois la sainte signature du Grand Muphti' (1948)

"Nous recevons de lui [du Mufti] des recommandations écrites et surtout un laissez-passer individuel, avec notre photo, qui pendant quelques mois sera un vrai talisman.  Plusieurs fois, en effet, en Palestine, nous trouvant au milieu d'une zone de combat, il nous est arrivé d'exhiber ce papier et de voir alors les Arabes oublier leur ferme intention de nous fusiller et même nous offrir toutes les marques du plus grand respect en baisant trois fois la sainte signature du Grand Muphti."

Contexte: Il y 70 ans Hitler rencontrait le Mufti de Jérusalem à Berlin (photo, 28/11/1941)

Si l'ouvrage de Gilbert Achcar Les Arabes et la Shoah. La guerre israélo-arabe des récits, Sinbad, Actes Sud, 2009, fit l'objet de nombreuses critiques au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, rien de tel ne se produisit en France. Or le livre est truffé d'erreurs. Voici ce qu'Achcar écrit dans Le Monde Diplomatique:

"Le mufti fut néanmoins érigé en représentant attitré des Palestiniens et des Arabes par la désinformation du mouvement sioniste qui, en 1945, exigea — sans succès — qu’il soit déféré devant le tribunal international de Nuremberg, comme s’il avait représenté un rouage essentiel de la machine génocidaire nazie."

Or le mufti se vantait lui-même de son rôle dans la Shoah :
"Il semble que mon entrevue avec Eichmann ait compromis les démarches déployées à l'époque auprès du Führer pour arrêter le génocide des juifs". [1]

Achcar écrit également que le mufti était "Largement discrédité dans le monde arabe, sinon en Palestine, avant même son exil européen". Or ceci est démenti par Jacques de Reynier, le délégué de la Croix-Rouge, qui lui rend visite au Caire en 1948 avant de se rendre en Palestine.  "Son Excellence", comme il le nomme, le décrit comme un "homme de noble prestance, [qui] a eu une vie quelque peu agitée". Il se plaint à de Reynier de "la méchanceté des Juifs".  Bien informé, de Reynier savait que la meilleure protection qu'il pouvait avoir auprès des Palestiniens était la protection de Haj Amine El-Husseini. Il avait donc de bonnes raisons d'aller le voir au Caire:


"Nous recevons de lui des recommandations écrites et surtout un laissez-passer individuel, avec notre photo, qui pendant quelques mois sera un vrai talisman.  Plusieurs fois, en effet, en Palestine, nous trouvant au milieu d'une zone de combat, il nous est arrivé d'exhiber ce papier et de voir alors les Arabes oublier leur ferme intention de nous fusiller et même nous offrir toutes les marques du plus grand respect en baisant trois fois la sainte signature du Grand Muphti." [2]

[1] Interview avec Edouard Saab, rapportée par ce dernier dans Le Monde du 6 juillet 1974 sous le titre "Haj Amine El-Husseini est mort"). Cité par Nathan WeinstockTerre promise, trop promise - génèse du conflit israélo-palestinien, 1882-1948,  Éditions Odile Jacob, 2011, p. 290.
 [2] Jacques de Reynier, A Jérusalem un drapeau flottait sur la ligne de feu, Editions de la Baconnière,  Neuchâtel, 1958, p. 32.

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