"L'expérience brutale de la privation totale de droits, du pillage et de la destruction des juifs d'Europe ne fait pas partie des histoires ou des thèmes qu'on peut régler mardi et classer mercredi." Péter Nádas
L'organisme fédéral belge, le CECLR, et l'approche de la Shoah par les actes, par Rudi Roth
"On peut s’interroger à l’infini sur l’utilité d’une telle législation, mais dès le moment où elle a été adoptée, tout recul, toute banalisation relève de l’ignominie. Il ne s’agit pas simplement d’une insulte à la communauté juive, mais d’une blessure irréparable à la nécessaire mémoire des peuples." Marc Uyttendaele
Le Centre pour l'égalité des chances (CECLR) ainsi que le MRAX (Belgique: le Mrax zappe le génocide juif) ont été deux acteurs majeurs dans "les Assises de l’interculturalité [qui] proposent d’effacer, dans la loi visant à réprimer le négationnisme, la référence à la Shoah et partant de contester qu’il s’agit d’un moment particulier et unique de l’histoire contemporaine".
L'énoncé sur le site du Centre pour l'égalité des chances de ses compétences :
"Quelles sont les compétences du Centre ? Le législateur a clairement fixé les missions du Centre dans la loi de création de notre organisme. Cette loi a été naturellement adaptée au fil des ans. Nous avons par exemple ajouté le négationnisme [lequel?, pourquoi ne pas le désigner?], la traite des êtres humains et les discriminations générales."
Or il faut aller chercher une explication plutôt tortueuse de ce qu'est le "négationnisme" dans le lexique:
"Révisionnisme : Le révisionnisme désigne l'attitude critique de ceux qui remettent en cause de manière rationnelle (par exemple suite à la découverte de nouveaux documents historiques) les fondements d'une doctrine, d'un jugement, d'une opinion couramment admise en histoire, ou même de faits établis.
Le révisionnisme peut désigner également une tendance à remettre en question les atrocités du nazisme dans les camps de concentration et à minimiser, voire à nier, le génocide des juifs. Il convient, dans ce cas de parler de négationnisme."
On préférera donc à celle du CECLR la définition du négationnisme de l'historienne française Nadine Fresco :
"En raison de sa nature et de son ampleur, le génocide perpétré par le régime nazi contre les juifs a profondément marqué l’histoire contemporaine. La manifestation la plus paradoxale de cette empreinte est fournie par l’entreprise qui consiste à nier la réalité de ce génocide. Qualifiée de «révisionniste» par ses promoteurs à partir des années 1970 pour lui donner un semblant de scientificité, celle-ci est désignée à juste titre comme négationniste par les historiens.
Réactualisant une longue tradition antisémite de l’Occident, les négationnistes dénoncent un prétendu complot juif international qui aurait fabriqué de toutes pièces cette «escroquerie du XXe siècle» dans le but de justifier l’existence de l’État d’Israël et d’extorquer de scandaleuses réparations à une Allemagne innocente."
On est tenté de dire que, à l'instar du MRAX, le Centre pour l'égalité des chances, zappe aussi la question du meurtre industriel de 6 millions de Juifs (dont un million et demi d'enfants).
C'est donc logiquement que Edouard Delruelle, directeur du Centre pour l’Egalité des chances, se félicite de l'excellent travail effectué par les Assises de l'Interculturalité (rapport final, novembre 2010, p. 122):
"Malgré ces remarques critiques [la suppression de la référence au génocide de 6 millions de Juifs d'Europe n'en fait pas partie], et d’autres désaccords mineurs que je n’ai pas la place d’exposer ici, j’approuve une majorité des recommandations qui se trouvent dans ce Rapport."
La grande différence entre le MRAX et le CECLR réside dans le fait que le MRAX est une organisation privée qui reçoit des subsides tandis que le CECLR est un organisme public autonome (loi du 15 février 1993) né de la volonté politique du Parlement et du Gouvernement fédéral belge et tombe sous la compétence du premier ministre du gouvernement fédéral.
Par ailleurs, il est curieux que le co-directeur du CECLR, Edouard Delruelle, a permis qu’une plainte contre la RTBF qui a consciemment et sciemment "oublié" de mentionner les victimes juives du camp d'extermination d’Auschwitz soit considérée comme non-fondée par le conseil de déontologie de la presse dont il fait également partie.
Mais voilà que non seulement le CECLR n'entame pas un procès, mais deux membres de cette association censée promouvoir la lutte contre le racisme (et la cyber-haine) sont "amis" avec l'un des 5 membres de l'AEL arborant cette caricature tendancieuse. Ces 2 membres du CECLR sont Marco Van Haegenborgh (Head of Unit fight against racism) et Rachida Lamrabet, juriste et écrivain (qui a déjà été dénoncée au CECLR pour ses signatures de pétitions anti-israéliennes mais sans aucune réponse de leur part). Ne pas agir passe encore; mais pour des représentants du CECLR avoir ces personnes arborant de telles caricatures en tant "qu'amis" (même virtuels) ça dépasse les limites ...
Le CECLR s'est également distingué par la façon dont il a traité - pour faire diversion - le lien supposé entre judaïsme et lapidation : Belgique: protestation au Centre pour l’Egalité des Chances suite à un dérapage
Procès aux Pays-Bas: la Ligue Arabe Européenne cite le Centre pour l'Egalité des Chances comme témoin
Ce site est dédié aux millions d'Européens qui, malgré d'incessantes campagnes de désinformation, ne croient pas que les Juifs ne sont capables que du pire; ne dissimulent pas leur antisémitisme dans le langage de l'antisionisme; et savent qu'Israël représente ce qu'il y a de meilleur dans une démocratie.
2 commentaires :
Nous sommes aujourd’hui en présence d’une certaine régression, y compris sur le plan de l’historiographie. Après la Seconde Guerre mondiale s’est développée une historiographie très importante sur le nazisme et le fascisme, qui, tout au moins pendant les anées 60, 70 et une partie des années 80, essayait de ramener le nazisme et le fascisme à leurs racines européennes. Depuis une quinzaine d’années en revanche, on constate la tendance de plus en plus forte à expulser en quelque sorte le nazisme de la trajectoire du monde occidental et de l’Europe moderne. Aujourd’hui par exemple, Ernst Nolte, dans plusieurs écrits depuis maintenant une bonne vingtaine d’années, défend la thèse selon laquelle le nazisme s’expliquerait exclusivement comme réaction au bolchevisme, à la révolution russe, et ne serait donc qu’un phénomène engendré par le communisme. François Furet, historien de la Révolution Française, qui peu avant sa mort a publié un livre intitulé -Le passé d’une illusion, qui est une histoire du communisme au 20e siècle - propose une nouvelle interprétation selon laquelle le fascisme et le nazisme d’une part, et le communisme de l’autre ne seraient que deux phénomènes parallèles des réactions à l’Occident libéral, certes opposées l’une à l’autre mais qui s’alimenteraient réciproquement. Puis il y a d’autres interprétations, comme par exemple celle de Goldhagen, qui réduit le nazisme à une sorte de pathologie allemande. Ce serait encore une fois une histoire exclusivement allemande, qui trouverait sa fin en 1945 puisque après 1945 pour Goldhagen, les Alliés auraient « éduqué » les Allemands et extirpé ce « virus germanique ». Finalement, toutes ces explications, très différentes les unes des autres, parfois contradictoires, partagent au moins une vision du nazisme comme quelque chose d’étranger à l’Occident et à l’Europe. C’est donc également une vision très apologétique de l’ordre libéral occidental actuel qui consiste à dire : on s’est débarrassé de ces monstres totalitaires en 1945, l’Histoire a repris son chemin sur des rails normaux et nous vivons désormais dans le meilleur des mondes. C’est l’interprétation aujourd’hui dominante, du point de vue historiographique, il y a là une certaine régression. Il faut donc s'inscrire contre ces lectures dominantes, au moins du point de vue de ce qu’on appelle l’usage public de l’histoire, c’est-à-dire des interprétations qui trouvent le plus d’écho et de consensus dans les médias et la presse. Il faut s'inscrire contre cela pour souligner les racines profondes du nazisme dans l’histoire occidentale.
Nous devons ré-envisager un peu mieux que nous ne l'avons fait la barbarie ou la catastrophe qui a signé notre temps.
Les discours qui tachent d’établir une nouvelle éthique avec des comités pour ce faire, des experts qui ne produisent que davantage de discours, ne répondent pas à ce qui s'est passé et à ce que nous devons repenser. Tout le monde voudrait s’en tirer à trop bon compte. La Shoah n’est pas un accident malencontreux. Elle a fait chavirer le destin de l’Occident et nous impose de le repenser.
Le nazisme a été battu par les armes mais son idéologie est loin d’avoir disparue. On ne peut pas se contenter de croire ou de dire que les Nazis sont des monstres et passer à autre chose. L’histoire est bien plus compliquée que cela. Le refus de Jankélévitch de parler aux allemands après la Shoah est bien trop court et bien trop commode. Nous n’en sommes pas quittes. Chacun de nous en est marqué.
Quant à l’autre « cliché » qu’est le « devoir de mémoire » — il est très en-dessous de ce qu'il nous faudrait réussir à penser, de ce que nous avons à soutenir. Nous avons quelque chose à faire de bien plus décisif que simplement garder mémoire de la Shoah. Nous avons à en soutenir l’effroi, à penser la manière dont l’être de l’Être Humain en a été atteint.
M. Marco Van Haegenborgh, fonctionnaire au Centre pour l'Égalité des Chances (CECLR) nous communique qu’il n’est plus Head of Unit fight against racism depuis octobre 2009.
Il précise aussi que dès qu’il a été mis au courant qu’un des ses amis Facebook utilisait le ‘cartoon antisémite’ comme profil, il a rayé cette personne de sa liste d’amis. Il s'agissait d'une caricature émanant de l'Arab European League représentant deux Juifs ventripotents se tenant debout près d'un minuscule monceau de cadavres au milieu desquels est planté une pancarte avec l'inscription "Auschwitz". L'un des Juifs tient une feuille de papier à la main et dit "We have to get to the 6000000 somehow!" (Il s'agit d'une allusion à l'extermination industrielle de 6 millions de Juifs européens - dont un million et demi d'enfants par le régime nazi) L'autre Juif répond: "I don't think they are Jews". Signalons que cette caricature était utilisé comme profil facebook par plusieurs membres de l'AEL (http://www.antisemitisme.be/site/event_detail.asp?eventId=1038&catId=44&language=FR) sans que le CECLR, mis au courant, semblait s'en offusquer.
Dans sa lettre, M. Marco Van Haegenborgh qualifie spécifiquement cette caricature d’antisémite « antisemitische cartoon ».
Par ailleurs Mme Rachida Lamrabet, fonctionnaire au CECLR, compte toujours la personne de l’AEL en question parmi ses amis sur Facebook.
Nous déplorons que cette caricature n'ait, jusqu'à présent, pas été dénoncée comme telle par les deux responsables du CECLR :
MM. Joseph De Witte et Eduard Delruelle. Alors qu'aux Pays-Bas l’AEL a bien été condamné en appel (http://www.cidi.nl/Nieuwsberichten/AEL-in-hoger-beroep-veroordeeld-voor-Holocaustcartoon.html ) au mois d’août 2010, le CECLR est resté silencieux en dépit du fait que l’initiative de ce cartoon de l’AEL a son origine en Belgique. On serait tenté de penser que l’AEL est tellement confiant dans le CECLR et ses relations en place qu’elle a cité le CECLR comme témoin à son procès au Pays-bas. (http://belgiqueisrael.blogspot.com/2010/01/proces-aux-pays-bas-la-ligue-arabe.html)
M. Van Haegenborgh nous signale, par ailleurs, qu’il est très sensible aux problèmes relatifs à l’antisémitisme.
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