dimanche 22 février 2009

Le nouvel antisémitisme, par Irwin Cotler

"Dans le passé, les plus dangereux antisémites étaient ceux qui voulaient rendre le monde Judenrein, "libre de Juifs". Aujourd’hui, les plus dangereux antisémites pourraient être ceux qui veulent rendre le monde Judenstaatrein, "libre d’un État juif". (Per Ahlmark, Vice-Premier Ministre de Suède).

Source: Point de Bascule
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"Nous assistons aujourd’hui à l’émergence d’un nouvel antisémitisme, sophistiqué, virulent, et même mortel dans certains cas, et ce phénomène prend de l’ampleur. Il ne suffit plus de sonner l’alarme devant ce danger, il faut agir. L’histoire nous l’a enseigné par la tragédie : ça commence par les Juifs, mais ça ne s’arrête jamais à eux."
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Irwin Cotler est député libéral et ancien ministre de la Justice et Procureur général du Canada. Il a coprésidé la première conférence de la Coalition parlementaire internationale de lutte contre l’antisémitisme qui s’est tenue à Londres du 15 au 17 février.
Traduction de : The new anti-Semitism, par Irwin Cotler, National Post, le 17 février 2009

Réfléchissant sur la vague contemporaine d’antisémitisme, Elie Wiesel, un survivant de l’Holocauste, a déclaré "Je ne me suis pas senti comme je me sens maintenant depuis 1945. Je pense que nous avons des raisons d’être inquiets, et même d’avoir peur... Il est maintenant temps de mobiliser les efforts de l’humanité entière." C’est ce sentiment qui rassemble des parlementaires du monde entier pour la première conférence de la Coalition parlementaire internationale de lutte contre l’antisémitisme.

Nous assistons aujourd’hui à l’émergence d’un nouvel antisémitisme, sophistiqué, virulent et même mortel qui rappelle l’atmosphère des années 1930, et sans parallèle depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ce nouvel antijudaïsme a trouvé sa première expression juridique dans la résolution "Le sionisme est une forme de racisme" des Nations Unies, mais il va plus loin.

L’antisémitisme traditionnel est la discrimination à l’égard des Juifs, la négation de leur droit de vivre en tant que membres égaux de la société où ils ont habitent, ou l’assaut contre ce droit. Le nouvel antisémitisme concerne la discrimination à l’encontre du droit du peuple juif de vivre en tant que membre égal de la famille des nations - le déni, ou l’assaut contre le droit du peuple juif de vivre - Israël étant le "Juif collectif parmi les nations".

Observant les intersections complexes entre l’ancien et le nouvel antisémitisme, Per Ahlmark, Vice-Premier Ministre de la Suède, a fait remarquer que le nouvel antisémitisme est caractérisé par des attaques contre les "Juifs collectivement - l’État d’Israël", qui "démarrent une réaction en chaîne d’agressions contre les Juifs et les institutions juives". Dans ma ville natale de Montréal et ses environs, j’ai été témoin de manifestations de ces phénomènes – de la bombe incendiaire sur mon ancienne école secondaire à l’agression physique de Juifs dans les Laurentides jusqu’aux slogans vociférés contre Israël durant le conflit dans la bande de Gaza.

Permettez-moi d’être clair : je n’ai jamais affirmé qu’Israël devrait être à l’abri de la critique. Les participants aux soi-disant rassemblements anti-Israël qui scandaient "les Juifs sont nos chiens" sont toutefois semblables aux antisémites traditionnels. Tout cela confirme la conclusion d’Ahlmark : "Dans le passé, les plus dangereux antisémites étaient ceux qui voulaient rendre le monde Judenrein, "libre de Juifs". Aujourd’hui, les plus dangereux antisémites pourraient être ceux qui veulent rendre le monde Judenstaatrein, "libre d’un État juif."

Les indicateurs de ce nouvel antisémitisme sont différents de l’ancien. Aujourd’hui, il est rare qu’un Juif se voie refuser le service dans un restaurant. Mais aujourd’hui, Israël fait l’objet d’une menace de génocide par l’Iran et ses mandataires terroristes, le Hezbollah et le Hamas ; l’État juif est singularisé sur la scène internationale alors que les principaux violateurs des droits de l’homme sont à l’abri d’accusations ; la légitimité d’Israël est l’objet d’un examen discriminatoire dans la mesure où, aux fins des groupements régionaux à l’ONU, on ne considère même pas qu’Israël "existe" en Asie ; et des voix moins sophistiquées propagent des rumeurs que les Israéliens injectent le virus du sida aux Palestiniens. Les Juifs ne subissent peut-être plus de discrimination dans l’accès au logement, mais ils sont maintenant privés du droit égal à une patrie.
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Comme disait le chroniqueur du New York Times Thomas Friedman : "Critiquer Israël n’est pas antisémite, et dire le contraire est ignoble. Mais singulariser Israël pour l’opprobre et des sanctions internationales hors de toute proportion avec quelque autre pays du Moyen-Orient est antisémite, et ne pas le dire est malhonnête".

L’intensification de l’antisémitisme impose la création d’une coalition parlementaire internationale pour affronter cette forme de haine ancienne et persistante. Nous ne pouvons pas nous taire. Le moment est venu d’agir. Comme l’histoire nous l’a enseigné : ça commence avec les Juifs, mais ça ne s’arrête pas à eux."
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Photo: manifestation anti-iraélienne à Montréal le 10 janvier.

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