"La responsabilité des Occidentaux et des médias en particulier est immense. A couvrir sans cesse les échecs et les impasses palestiniennes, ils les suscitent à nouveau. Les médias et les diplomaties se satisfont de la victimisation des Palestiniens, sorte de racisme feutré et infantilisant qui permet d’éviter à chaque fois le test de la réalité et de l’efficacité. Privés de Liberté politique, les Palestiniens ne peuvent trouver dans l’opinion occidentale que commisération condescendante et presque jamais le dur langage de la vérité." Pierre Raiman
Source: Dures Vérités à Gaza (III), texte repris du blog Autour de la Liberté
Israël gagne la guerre sur le terrain et la perd dans les médias et dans l’opinion internationale. Redoutable paradoxe, le Hamas déteste non seulement Israël mais aussi toute la société occidentale et c’est pourtant là dans les rues, les rédactions et les chancelleries d’Europe qu’il l’emporte de loin !
Il y a donc quelques vérités simples qu’il faut rappeler :
1) Contrairement aux mensonges répétés et aux oublis bien pratiques des rédactions et des diplomates, le Hamas viole à plusieurs niveaux le droit international. Il le fait en visant avec ses missiles et roquettes délibérément les populations civiles. Il le fait aussi en tirant au milieu des populations civiles qui lui servent de bouclier humain. Il le fait enfin en proclamant sa volonté de faire disparaître Israël, un état reconnu par la communauté internationale.
2) Le principe de proportionnalité dans la riposte n’implique aucunement que du fait que les tirs du Hamas n’ont fait en 7 ans que quelques victimes civiles, la riposte israélienne soit disproportionnée parce qu’elle entraîne parmi les terroristes du Hamas ou dans la population civile un nombre considérablement plus élevé de victimes. "Je ne comprends pas les comparaisons qui sont faites sur les bilans des morts côté israélien et côté palestinien. Lorsqu’il y aura un millier de morts du côté israélien, alors l’Europe sera satisfaite ?" s’insurge l’écrivain de gauche A.B. Yehoshua, partisan de la création d’un Etat palestinien.
3) Inversement un Etat qui ne prendrait pas la défense de ses citoyens ciblés plusieurs années durant par des tirs d’obus, de roquettes et de missiles, non seulement faillirait à sa mission de protection de ses ressortissants, qui fonde sa légitimité, mais plus encore encouragerait ses ennemis à tirer plus, plus loin et plus fort. C’est d’ailleurs ce qui s’est produit depuis quelques mois, le Hamas profitant de la trêve pour améliorer la quantité, la qualité et la portée de ses armes.
4) L’exemple historique qui vient immédiatement à l’esprit est celui de l’Angleterre dont les villes comme Coventry furent bombardées par la Luftwaffe au cours de la Seconde Guerre Mondiale, puis par les tirs de missiles V1 et V2. La riposte britannique consista entre autres dans la mise en pratique des bombardements stratégiques qui rasèrent nombre de villes allemandes. Le bombardement de Dresde entre autres fit plusieurs dizaines de milliers de morts. Ces bombardements de représailles n’avaient pas d’objectifs militaires précis, les civils en furent les principales victimes. Il est évident à contrario que la riposte israélienne ne cible pas les civils en particuliers.
5) A ce propos la référence à la Seconde Guerre mondiale a évidemment tout son sens. La propagande du Hamas, d’une certaine gauche et aussi d’une certaine droite n’a de cesse d’insinuer, selon une antienne connue et malodorante, qu’Israël ne fait que reproduire contre les victimes palestiniennes, les crimes commis par les Nazis contre Juifs. Ainsi lit-on de ridicules comparaison entre Gaza City et le ghetto de Varsovie. Comme si les combattants du Hashomer Hatzaïr, du Bund, du Dror ou du Betar avaient bombardé les villes allemandes ou même polonaises, comme si la population de Gaza se révoltait contre des déportations et des camps de la mort. Il y a toujours quelque chose de répugnant à devoir se défendre de telles falsifications historiques. En politique et en Histoire plus les mensonges sont gros, plus ils semblent, au moins un temps, fonctionner.
6) Plus direct encore, un cardinal du Vatican a vu en Gaza un camp de concentration. Le Pen à qui aucun détail n’échappe a fait de même. Et Mahmoud Abbas qui dénonce une politique d’annihilation du peuple palestinien est amplement repris par les journaux qui bien sûr font semblant de ne pas voir la référence à la Shoah. Personne n’a dit que ce "désir" de Shoah qui habite certains Palestiniens et leurs partisans témoigne d’un goût et d’un désir de mort douteux et dangereux. Ahmadinedjad a de quoi se réjouir, le but réel de ces comparaisons n'est que de délégitimer l'existence d'Israël.
7) Quelques pseudo analystes, filant aussi la comparaison avec la Deuxième guerre, prévoyaient que Gaza serait un nouveau Stalingrad. La comparaison insensée à la base oubliait que Stalingrad fut d’abord une manœuvre d’encerclement isolant l’armée nazie de ses arrières. Surtout elle impliquait que la population de Gaza mobilisée par le Hamas se batte pour chaque pâté de maison. A Stalingrad la population ressentait que la barbarie nazie était le mal absolu et c’est pour cela qu’elle ressouda les rangs malgré la dictature communiste. A Gaza, il n’en a rien été précisément parce que l’analogie entre Israël et les Nazis est aussi honteuse que stupide et que ce sont les fanatiques du Hamas qui s’approchent le plus de la bestialité du IIIe Reich.
8) Bien au contraire, les crimes du Hamas n’ont fait que redoubler au cours des derniers mois. Imposition de la loi islamique, interdiction des fêtes mixtes, violence contre les opposants, les chrétiens. Quels journalistes ont rapporté la réintroduction récente par le Hamas de la crucifixion comme peine capitale, quelques jours avant l’assaut israélien ? Pendant les trois semaines de conflit la pratique des boucliers humains a été généralisée, ainsi que celle consistant à trouver refuge dans les mosquées, les hôpitaux et les écoles. Dans les médias ces vérités ne trouvent guère d’expression. Seul un courageux reporter du Corriere della Sera a publié ces faits que de nombreux Palestiniens s’efforcent pourtant de faire connaître.
9) Un autre mensonge abondamment répété concerne la prétendue légitimité démocratique du Hamas. Partout les commentateurs répètent à l’envi que le Hamas a gagné les élections de 2005 démocratiquement. Un des scrutins les plus démocratiques du monde arabe, assure t-on ! Aucun de ces porte-étendards de la démocratie ne semble se préoccuper du fait que depuis le Hamas a, par un coup d’état, chassé de Gaza le président Mahmoud Abbas lui aussi élu, que nombre des partisans du Président ont été tués, battus, torturés et certains défenestrés des tours de Gaza City.
10) Quant au scrutin lui-même, suffit-il à assurer une légitimité au Hamas ? Une élection où les deux principaux partis paradent dans les rues leurs milices armées, mène-t-elle à un scrutin libre ? Les journalistes et les diplomates sont-ils sûrs que dans ce contexte la libre expression de tous les courants de la société palestinienne puisse se réaliser ?
Comment se fait-il qu’aucun parti renonçant aux milices et à la lutte armée, mais ne renonçant pas aux ambitions nationales des Palestiniens, qu’aucun parti se proposant d’atteindre ses objectifs par des voies pacifiques et par la négociation n’ait vu le jour ? Il est pourtant évident que de telles opinions existent parmi les Palestiniens et que les conditions de libre expression et donc d’élections authentiquement libres n’étaient pourtant pas réunies en 2005, et ne le seront pas tant que des miliciens fanatiques du Hamas, du Djihad Islamique ou des Brigades Al-Aqsa feront régner la terreur, non seulement contre Israël, mais aussi dans les rues palestiniennes.
11) Nouvel exemple historique, les élections allemandes de 1933. Alors aussi les Nazis emportèrent le scrutin, ne gagnant comme le Hamas qu’avec une majorité relative, après un processus électoral ou Sections d’Assaut nazis et milices communistes du Front Rouge rivalisèrent de terreur et d’intimidations, marginalisant les modérés. Quelques mois plus tard, au prétexte de l’incendie du Reichstag, un coup d’état là aussi assurait le pouvoir aux Nazis. Les élections de 1933, rendaient elles légitimes le pouvoir Nazi de 1934 ?
12) A la décharge de certains, il faut reconnaître que la confusion entre démocratie et Liberté, élections Libres et scrutin à bulletin secret, bat son plein. Les Palestiniens méritent mieux que des ersatz ! Une démocratie n’est réelle que si elle est l’expression d’une société civile Libre, où la liberté d’expression soit garantie dans les textes comme dans les faits. Une élection à son tour n’est Libre que si toute la société peut s’exprimer dans sa diversité. Le bulletin secret est une condition nécessaire mais non suffisante. Les régimes communistes s’affublaient du qualificatif de "démocratie populaire", on sait ce qu’il en était. Loin de n’être qu’une question théorique ou historique, il s’agit en Palestine d’une question décisive. Que seront, que peuvent être les élections palestiniennes de 2009 ?
13) Le test de la Liberté, qui permettra de jauger les futures élections palestiniennes est le suivant : un Palestinien en faveur de négociations pacifiques avec Israël, convaincu qu’il s’agit de la meilleure voie stratégique pour son peuple, pourra t-il tenir meeting à Gaza City et sans crainte, rentrer librement chez lui ? Ce test conçu en son temps par les dissidents soviétiques, confrontés au leurre des élections pseudo démocratiques, prend tout son sens à Gaza.
14) Les futures élections palestiniennes ont d’autant plus d’importance que les deux partis Fatah et Hamas sont passablement discrédités. La popularité apparente du Hamas pourrait en effet ne pas survivre à l’épreuve du bilan de sa stratégie. Pour les Palestiniens il faut le souhaiter. Les flots pro palestiniens qui ont déferlé, dans le confort des démocraties européennes, et qui assimilent les Israéliens aux Nazis, le Hamas à la résistance ou Hanyeh à Che Guevara ne veulent surtout pas se poser la seule question qui vaille. Quelle est la meilleure option pour les Palestiniens, les roquettes ou la négociation ? Mais pour les Palestiniens de Gaza à Ramallah, c’est une alternative décisive.
15) Mais cette alternative ne peut exister sans une perspective économique et politique sérieuse et crédible. L’offensive militaire à Gaza se solde par une incontestable victoire sur le terrain et peut-être l’arrêt pour un temps des tirs de roquettes, mais il laisse en place le Hamas. Ce n’est pas une victoire décisive, ni une Libération pour les Palestiniens qui sont les premières victimes du Hamas.
De leur point de vue, le carnage de la guerre n’apporte aucun changement dans l’immédiat. Le Hamas peut aussi consolider son pouvoir par la répression, comme Saddam Hussein le fit après la première guerre du Golfe. Souvenons-nous, après la première guerre du Golfe en 1991, Saddam défait est laissé en place au grand désespoir de ses opposants. Or aucune perspective pacifique ne peut se dessiner avec un califat islamique aux portes de Tel-Aviv.
16) Or le Hamas se moque de la Palestine. Parti de fanatiques religieux, il n’a pas pour objectif l’établissement d’un état palestinien. Il n’a pas de différend territorial avec Israël, mais un conflit existentiel. C’est pourquoi il ne peut renoncer ni aux attentats, ni aux tirs de roquettes sur les populations civiles. Il n’a pas saisi la possibilité que lui offrait sa victoire électorale pour bâtir un état palestinien à Gaza, mais pour stocker des armes en vue d’une dérisoire confrontation où ses militants n’ont été que les jouets de leur fantasme de martyr et surtout les pions de leurs bailleurs iraniens.
Que des centaines de milliers de Palestiniens aient servi de boucliers humains et que des centaines d’innocents aient péri leur est indifférent.
17) Le Hamas comme l’expliquait Amir Taheri, n’est pas qu’une force brute. L’appareil de terreur complète, et en cela il ne diffère pas des autres systèmes totalitaires, une hydre qui vampirise l’économie, la détruit et la rackette. Or Gaza ayant ses frontières fermées avec Israël et l’Egypte dépend pour partie de l’approvisionnement par les tunnels qui franchissent la frontière avec l’Egypte. Les mêmes tunnels qui amènent les missiles approvisionnent aussi en nourriture et produits de base. Israël ne peut détruire ces tunnels sans offrir une alternative. Lorsque les marchandises ne franchissent plus les frontières, les armes et les soldats le font. C’est exactement ce qui s’est passé et se reproduira si le désespoir économique persiste.
18) Depuis le cessez-le feu, le Hamas s’efforce de restaurer sa dictature, secouée, défaite mais non abattue par l’armée israélienne. La sinistre Force Exécutive, police politique du Hamas, a refait son apparition. Les opposants du Fatah et leurs sympathisants sont systématiquement arrêtés, torturés.
Des dizaines, peut-être des centaines de militants du Fatah sont mitraillés dans les jambes. Signature sanglante du Hamas envers ses adversaires. Ceci se produit dans le plus grand silence médiatique. Il est sidérant de constater comment les dizaines de journalistes qui au fil des années n’ont cesser de marquer leur sympathie au Fatah, semblent avoir oublié les nationalistes faces aux islamistes, comme s’ils étaient magnétisés par un extrémisme anti-israélien et antisémite plus fort.
19) Les grands desseins diplomatiques du Quartet, les vieilles soupes froides telles celles que le sénateur Mitchell se prépare à réchauffer ne font qu’alimenter la bassine des illusions. Seuls l’essor économique et les initiatives locales peuvent esquisser des solutions pacifiques autour d’un état de droit. Celui-ci résulte de l’essor économique et le permet. A ce propos toute aide internationale qui serait préemptée et détournée par le Hamas, par la force ou au nom de son réseau d’aide sociale se retournerait immanquablement en son contraire en livrant les populations de Gaza à la merci des charités fanatiques.
20) Dans le même ordre d’idée, la recherche d’un gouvernement palestinien d’union regroupant Hamas et Fatah sera sans doute réclamée par les diplomaties européennes et arabes s’employant à faire fleurir un nouveau bouquet d’illusions. Comme s’il était possible de concilier la sharia et l’Etat de droit, la coexistence avec Israël et la poursuite des attentats et des tirs de roquettes, une authentique aspiration nationale palestinienne et son détournement par l’islamisme radical et surtout son instrumentalisation par Téhéran.
Car c’est bien de cela qu’il s’agit un gouvernement Hamas/Fatah aurait tôt fait de devenir la marionnette de Téhéran. Dans tout système où la Liberté est niée, l’extrémisme totalitaire l’emporte. Ces pseudo gouvernements de coalition ont été essayé, en d’autres temps, notamment après guerre en Europe de l’Est avec des démocrates plus convaincus que ceux du Fatah. On connaît le résultat.
21) La responsabilité des Occidentaux et des médias en particulier est immense. A couvrir sans cesse les échecs et les impasses palestiniennes, ils les suscitent à nouveau. Les médias et les diplomaties se satisfont de la victimisation des Palestiniens, sorte de racisme feutré et infantilisant qui permet d’éviter à chaque fois le test de la réalité et de l’efficacité. Privés de Liberté politique, les Palestiniens ne peuvent trouver dans l’opinion occidentale que commisération condescendante et presque jamais le dur langage de la vérité.
22) Or la perspective politique d’un état palestinien vivant à côté d’Israël, n’est nullement inscrite avec certitude dans l’avenir. Nombreux sont les peuples qui n’ont pu accéder à la communauté des Etats. De l’existence des peuples à la construction d’un état différentes voies sont possibles mais elles sont étroites. La décolonisation a toujours été le schéma favorisé par l’O.L.P. et le Fatah, parce qu’il correspondait à leur propagande idéologique et parce que cette voie impliquait naturellement que le mouvement "anticolonial" soit investi sans élections à la tête du nouvel état et directement reconnu par la communauté internationale.
Les accords d’Oslo consacrant l’O.L.P. comme "seul représentant du Peuple Palestinien", s’engageait à fond dans cette illusion liberticide. Jamais les Palestiniens n’étant librement consultés.
23) Un modèle proche consiste à proclamer un état par le haut en organisant des élections dont l’estampille démocratique est donnée par une nuée d’observateurs de l’O.N.U. En un sens c’est le mécanisme des dernières élections palestiniennes. Or les élections ne sont pas la démocratie et celles-ci n’est pas en soi la Liberté. La voie la meilleure pour les Palestiniens passe par la constitution d’une Nation, c’est-à-dire d’une société civile et économique florissante qui favorise la Liberté.
Dans cette situation, le conflit avec Israël ramené à un différend territorial trouverait probablement une solution. Mais cette voie passe par l’éviction du Hamas, l’incomplète victoire israélienne laisse aux Palestiniens la difficile tâche de rejeter les fanatiques. Inversement à défaut de se constituer en nation pacifique et démocratique, les Palestiniens peuvent aussi végéter des décennies dans leur marasme actuel.
- Dures Vérités à Gaza
- Dures Vérités à Gaza (II)
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