lundi 24 février 2014

Comicratie: Plantu évoque Voltaire dans l'affaire Dieudonné

"C'est toujours le sarcasme généralisé, le dérisoirement correct. Guillon et Dieudonné procèdent d'une certaine façon d'une même manière de fonctionner: à savoir que la dérision a le dernier mot."

Le Figaro: Dérision systématique, rire obligatoire, infotainment...le philosophe François L'Yvonnet passe en revue la tyrannie de la rigolade et l'humorisation de notre société où les comiques ont pris le pouvoir.  Extraits:
Plantu avait marqué sur la paume de sa
main le mot "Voltaire" et la tendait au
philosophe  comme ultime argument: "Là,
il est marqué Voltaire sur ma main".  

Hallucinant de voir à quel point le comique/
cartooniste se prend au sérieux, quand il dit 
que sa démarche est voltairienne...
"Lors d'un débat qui a opposé Alain Finkielkraut au caricaturiste Plantu sur l'affaire Dieudonné, Plantu avait marqué sur la paume de sa main le mot «Voltaire» et la tendait au philosophe comme ultime argument…. Que vous inspire cette mise en avant de la liberté d'expression comme argument suprême?

Cette référence à Voltaire est frappante, elle veut tout dire. Quand on invoque Voltaire, on pense au Voltaire de l'affaire Calas, par conséquent on dit que les débats auxquels participent des gens comme Guillon [*] ou Dieudonné sont des affaires Calas en puissance. Mais l'affaire Calas, c'est une affaire de faibles, les Calas étaient abandonnés, sans Voltaire ils étaient voués au silence. Aujourd'hui c'est différent, la pseudo «liberté d'expression» est utilisée comme prétexte pour se ruer éperdument sous les sunlights! Dieudonné a beau se dire persécuté, il jouit d'une certaine impunité, il pavane il triomphe. Lorsque Voltaire intervenait, il prenait des risques, n'oublions pas qu'il a du s'installer aux confins du royaume, quand il n'était pas à l'étranger! Dieudonné, quand il va à l'étranger, c'est pour recevoir des fonds ou en envoyer vers le Cameroun. Ces gens n'ont jamais étés dans des situations inconfortables.

La liberté d'expression est un mot très à la mode. Une liberté quelque qu'elle soit, si elle ne comporte pas un risque, est un semblant de liberté. On utilise souvent la phrase de Desproges «on peut rire de tout, mais pas avec n'importe qui», comme nouveau credo des humoristes, ce grand «tout» incarnant la liberté d'expression en actes. Mais vous remarquerez qu'on a un élément qui est totalement mis de côté, c'est celui dont on rit. Dans la relation à trois humoriste-spectateurs-objet du rire, ce dernier est évacué. Aujourd'hui on assiste à un rire de compagnie, et de compagnie bien-pensante.

Ce rire sur commandes, c'est la compagnie des bons rieurs, telle qu'elle est pratiquée à son apogée chez Ruquier à On n'est Pas Couché par exemple, où l'on fait venir quelqu'un dont on se moque ensemble, qui n'est que prétexte au rire."


"[Guillon] est un rentier du rire, un « rebellocrate » comme disait Muray. Quand Guillon se dit persécuté par France Inter, il a sa rente de Canal plus derrière: chez Ardisson il était payé 9000 euros par chronique!" et "D'abord, les humoristes savent qu'ils ne prennent aucun risque en se moquant des politiques, car le véritable pouvoir n'est plus là. Le pouvoir, c'est l'argent, mais ça ils n'en rient pas. On n'a jamais vu Guillon se moquer des propriétaires de Canal ou de TF1."

4 commentaires :

Anne juliette a dit…

Plantu a beaucoup d'amis dessinateurs des pays du Maghreb dont il parle avec amour sur France Info : il a été "contaminé". Pour faire bonne mesure, il connait quelques dessinateurs israëliens dont il a pris bien soin de s'assurer qu'ils étaient très antisionistes.

Il est idiot quand il compare Voltaire à Dieudonné pour plusieurs raisons :

- La SHOAH n'avait pas encore eu lieu à l'époque de Voltaire bien qu'il y avait des persécutions et des pogroms antijuifs. Or le fond de commerce de Dieudonné est le négationnisme, donc inapplicable au XVIIIème siècle.

- A l"époque de Voltaire, l'Eglise catholique considérait les juifs comme les assassins du Christ : c'est ce qu'on appelait l'antijudaïsme. C'était même un dogme de cette Eglise. Donc, malheureusement, haïr le juif était banal et normal et Voltaire faisait comme ses contemporains.
Ce n'est que dans les années 1960, que l'Eglise catholique a admis que les juifs n'étaient pas les meurtriers de Jésus. Je l'ai déjà expliqué sur ce site, si on analyse la Bible correctement, c'est le pouvoir romain qui porte la responsabilité de la mort du Christ. Qui songerait persécuter les italiens pour ce qu'on fait leurs probables ancêtres? Personne. Alors pourquoi le faire avec les juifs? C'est uniquement la haine de ce peuple qui motive les antisémites depuis la nuit des temps.

- La pratique religieuse de l'époque était très importante, ce qui rajoute beaucoup à cette normalisation de l'antijudaïsme.

Donc, comparaison n'est pas raison et Plantu se trompe lourdement quand il compare car ce qui rend l'antisémitisme totalement intolérable aujourd'hui, c'est en bonne partie l'advenue de la SHOAH.

De plus, Dieudonné a été condamné 9 fois pour antisémitisme et négationnisme (il a fait appel pour les deux dernières condamnations mais pour les 7 autres, il a perdu en appel) : cela suffit largement à ne plus le considérer comme un humoriste.

PLantu cautionne donc l'antisémitisme et la négation de la Shoah en parlant ainsi parce qu'il soutient un individu dont la justice a reconnu en 7 fois (+ 2) qu'il tenait ce genre de propos.

Donc, ce dessinateur n'a aucune valeur morale et professionnelle. Ne regardons donc pas ces dessins dans le Monde et ignorons ces publications.


Philo a dit…

Vous aurez remarqué, Anne Juliette, que les journalistes, intellectuels juifs laissent tout passer. Dieudonné a pu sévir pendant une dizaine d'années sans qu'on s'en émeuve. Ce n'est que quand l'affaire a débordé sur le terrain du football en Angleterre qu'on a pris des mesures en France. Et même alors on, notamment les bien pensants de la communauté juive, a crié au scandale. Alain Finkielkraut a défendu la décision de Valls et Plantu s'est tout de suite posé en Voltaire - et il ne faisait pas de l'humour.

Anonyme a dit…

A force de fréquenter les dessinateurs antisémites de Gaza et de tout le Proche-Orient, insidieusement et plus ou moins inconsciemment, Plantu a perdu son âme ces dernières années. C'est triste de perdre son âme à plus de soixante ans lorsqu'on a été un excellent dessinateur. Encore quelques années, la vieillesse aidant, il parlera comme Dieudonné et consorts sur les juifs, Israël et la Shoah.
Oui, il faut porter plainte mille fois plutôt qu'une contre ces humoristes et ces dessinateurs à chaque dérapage.

Philo a dit…

Ca ne vous aura pas échappé, Anne Juliette, que François L'Yvonnet ne se limite pas à parler de Plantu. Il parle de Coluche, de l'abbé Pierre, de Dieudonné etc. Un autre "comique" larmoyant était Stéphane Hessel, objet de l'idolâtrie politico-médiatique. Ce genre d'idolâtrie est inconcevable dans d'autre pays.