samedi 25 février 2012

France: encore un livre d'Israël-bashing

Hessel déclarait dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung que l’occupation allemande était «relativement inoffensive» si on la comparait «avec la politique d’occupation actuelle de la Palestine par les Israéliens.» C’est dans ce contexte délirant qu’il convient d’inscrire ces propos très hesseliens (page 42): «Il y a encore un peu partout, et particulièrement en Allemagne autour de Francfort, autour de Munich, beaucoup de juifs, souvent revenus d’Israël, qui retrouvent dans le contact avec les «goys», quelque chose qui fait partie  de la joie de vivre».

La haine d'Israël se porte à merveille en France. Nous rapportions hier que le livre de Gilad Atzmon avait trouvé un traducteur et un éditeur français en un temps record. Le livre, nous dit-on, réunit trois qualités exceptionnelles: aussi explosif que Comment le peuple juif fut inventé, aussi dérangeant que L’Industrie de l’Holocauste, et aussi important que Le Lobby pro-israélien… avec un bonus en prime:  la possibilité de vous "dé-sioniser", concept si cher cher au préfacier le Belge Jean Bricmont: "Ce qui est en jeu dans la dé-sionisation de l'esprit américain", écrivait-il en 2007 aux Américains qui ont bien entendu remercié le Belge pour le conseil...  Voilà qu'il essaye son coup en France...

Voilà que sort “le Rescapé et l’Exilé” de Stéphane Hessel et Elias Sanbar.  Analyse de Gilles-William Goldnadel [1]:

C’est un étrange livre propagandiste à deux voix que Valeurs Actuelles m’a demandé de commenter. Apparemment, à front renversé, le respectable Elias Sanbar, ambassadeur de la Palestine auprès de l’Unesco, se fait moins  pro-palestinien, ou en tout état de cause, moins anti-israélien, qu’un Stéphane Hessel, qu’on ne présente plus, et à qui j’ai consacré mon «Vieil homme m’indigne!».



Pour comprendre la modernité politique du propos et de ses desseins, il faut le resituer dans le contexte politique du moment.  Les Arabes de Palestine ne sont plus intéressés, à supposer qu’ils l’aient été, par un règlement politique avec Israël, en tant qu’Etat du peuple juif, décrété par l’ONU lors du partage de 1947.  Au rebours de l’analyse tactique à laquelle s’était livré Yasser Arafat expulsé de Tunis et déconsidéré par son soutien à Saddam Hussein et qui a accouché des accords d’Oslo, la direction de l’OLP, à tort ou à raison, croit pouvoir espérer un délitement plus rapide de l’adversaire.
En Orient, la poussée irrésistible des Frères Musulmans, en Turquie, en Egypte, en Syrie, peut-être demain en Jordanie, laisse peu de place à un accommodement avec l’usurpateur du Dar Al Islam.
En Occident, la détestation médiatique et intellectuelle de tout état- nation occidental en général, et de l’Etat juif, occidentalissime par sa pugnacité et ses prouesses techniques, en particulier laisse augurer, preuves en main, un abandon que toute prochaine crise accentuera.
L’un des auteurs, Stéphane Hessel, lui-même, incarne de manière caricaturale la figure de «l’intellectuel humaniste critique» ayant le plus contribué à cette situation. Dans son bréviaire indigné à succès planétaire, sa seule indignation, en matière de politique étrangère, concerne les crimes attribués à Israël à l’encontre de la population de Gaza.

C’est donc dans ce cadre stratégique, que s’insère un dialogue sans contradictions  entre  deux amis dans lequel l’occidental Hessel tente, avec un certain succès, de convaincre son interlocuteur de Palestine de ce que, finalement, l’édification d’un Etat pour les juifs, finalisé dans l’émotion de la Shoah, était une funeste idée.

Disons-le tout de suite, il est rare qu’un arabe de Palestine s’exprime avec aussi peu d’acrimonie à l’égard d’Israël. Certes, je ne suis pas naïf, et je doute que cet ouvrage fasse objet d’une traduction en langue arabe, mais tout de même, il n’est pas courant, par exemple, qu’un membre de l’OLP évoque l’alliance du grand mufti de Jérusalem avec Adolf Hitler.  Toutefois, l’exercice a ses limites, et on ne trouvera dans les propos d’Elias Sanbar, aucune condamnation d’un Hamas et de ses méthodes terroristes avec lequel son Fatah s’apprête à se réconcilier et qui, au moment où ces lignes sont écrites, a envoyé de nouvelles rockets sur le territoire israélien.

Mais ce sont les propos de Stéphane Hessel qui pourraient inspirer la consternation, si nous ne nous connaissions déjà leur auteur qui, je le rappelle dans mon livre précité, déclarait dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung du 22 janvier 2011 que l’occupation allemande était «relativement inoffensive» si on la comparait «avec la politique d’occupation actuelle de la Palestine par les Israéliens.» C’est dans ce contexte délirant qu’il convient d’inscrire ces propos très hesseliens (page 42): «Il y a encore un peu partout, et particulièrement en Allemagne autour de Francfort, autour de Munich, beaucoup de juifs, souvent revenus d’Israël, qui retrouvent dans le contact avec les «goys», quelque chose qui fait partie  de la joie de vivre».

Pour se persuader, si besoin était, que dans une perspective, littéralement révisionniste, le nonagénaire encensé considère que l’avenir des juifs se trouve dans leur passé sans état refuge on lira encore: «les juifs intelligents sont, selon moi, ceux qui disent : «nous ne sommes pas un peuple attaché une terre». (Page 40). Inutile de dire qu’il n’attend pas pareille qualité intellectuelle du peuple arabe de Palestine dont il soutient chaque mètre carré, Jérusalem compris, de revendications territoriales.

Pour expliquer l’impasse du sionisme, ce fils d’une fille issue d’une lignée de banquiers prussiens antisémites mais qui revendique volontiers ses origines israélites –pour mieux accabler, comme souvent, Israël- explique (page 54) « c’est cette conception de la singularité juive qui explique selon moi l’évolution dangereuse, de l’Etat d’Israël. Si un peuple quelconque, mettons les Pakistanais, avait décidé de s’implanter en Afghanistan, qu’aurait-il pu arriver? Ce peuple aurait certainement fait du tort aux tribus afghanes, mais des afghans, sur le long terme seraient devenus Pakistanais ou, inversement, des Pakistanais seraient devenus afghans, il y aurait pas eu de séparation nette entre les deux peuples. Alors qu’un tel brassage des populations est inconcevable dans l’imaginaire des Israéliens et, disons-le, des Juifs. Il leur est impossible d’admettre que les autres puissent partager avec eux ce quelque chose de fondamental qu’ils considèrent comme exclusivement leur.» Au-delà de cette remarque stéréotypée dont le philosémitisme ne semble pas être la marque première, l’exemple pris du Pakistan, dont la création a nécessité le déplacement forcé de 17 millions de réfugiés pour donner une cohérence territoriale à cet Etat musulman en gestation, est particulièrement cocasse.

On retrouve également dans l’ouvrage les scories «d’Indignez vous!» Ainsi, la seule fois où le terrorisme y est flétri expressément c’est (page 26) pour y évoquer les organisations juives…

De même, Hessel reprend sans états d’âme le rapport Goldstone pour établir la responsabilité Israélienne lors de l’opération «Plomb durci» à Gaza, en oubliant de révéler à ses lecteurs que son auteur éponyme, s’en est repenti le 1er avril 2011 (dans un entretien au New York Times) en indiquant que s’il avait su ce qu’il savait aujourd’hui il écrirait que les Israéliens n’ont commis aucun crime de guerre , ne faisant que répliquer aux attaques du Hamas, et que c’est ce dernier qui a commis des crimes contre l’humanité en utilisant la population palestinienne comme boucliers humains.

Bien sur, Hessel ne réclame pas immédiatement le démantèlement d’Israël mais, néanmoins, exige de cet Etat le respect d’une résolution 194 des Nations unies, dont il fait une lecture malhonnête, et par conséquent exige le «retour des réfugiés» dans leur foyer, ce qui revient, à terme à la même chose.

Devant tant  d’inconséquences irresponsables, on hésite à faire la part entre l’homme et celle de son âge, mais j’ai toujours indiqué en vouloir davantage aux «hesselidolâtres» qui ont porté au pinacle l’ancêtre suprême qu’à l’objet vénérable de leur vénération.

Si je me suis permis d’utiliser le terme peu gratifiant de «propagandiste» pour qualifier un ouvrage dont je respecte et estime au moins l’un des auteurs, fut-il ambivalent (mais qui ne l’est pas lorsqu’il est engagé politiquement dans un conflit aussi passionnel), c’est parce qu’il comporte certaines contrevérités que l’on appelle, lorsqu’on est franc, mensonges.

Ainsi, Stéphane Hessel poursuit l’imposture que j’ai dénoncée de se présenter faussement comme le corédacteur de la déclaration universelle (quatrième de couverture), carte de visite, aussi prestigieuse qu’imméritée, raison pourquoi j’ai dédié mon «Vieil homme m’indigne» à René Cassin, son véritable, mais plus discret, rédacteur.  Il est vrai qu’au moment de l’impression du livre, le mien n’était pas encore publié…

Autre mensonge avéré, digne de la propagande nassérienne de la grande époque (page 179, « chronologie »), cette genèse de la guerre des six jours : «pour répondre aux menaces israéliennes contre la Syrie, accusée d’aider les fedayins palestiniens, Nasser demande le 16 mai 1967 à l’ONU le retrait des casques bleus du Sinai et décide le blocus du golfe d’Akaba… »

«Le rescapé et l’exilé» est finalement un livre emblématique du drame israélo-palestinien.  

Je ne reprocherais certainement pas à l’exilé de reprendre à son compte le récitatif arabe de la tragédie de Palestine. Il s’agit de sa vérité, et je ne veux pas douter de sa sincérité.  Mais j’avoue en vouloir à celui, qui  drapé dans son voile de souffrance vertueuse, attise les feux de sa passion.

Au-delà de ce personnage uniquement intéressant comme objet d’étude du triomphe de l’idéologie destructrice, il est peu douteux que le conflit territorial opposant deux peuples et deux droits aurait trouvé le chemin du compromis nécessaire, si certains, en Occident, n’encourageaient pas en permanence, de manière névrotique, l’irrédentisme et le sentiment victimaire.

[1] Stéphane Hessel était l'invité ce matin pour parler de son livre d'Emmanuel Faux sur Europe 1, lui-même, Emmanuel Faux, est l'auteur d'un livre sur Israël préfacé par l'ami Charles Enderlin.  Et sa mère n'est autre que Gisèle Halimi une anti-israélienne de premier ordre!  Vraiment on peut parler d'une exception culturelle et médiatique française.

1 commentaire :

Anonyme a dit…

Les propos de Stéphane Hessel font la paire avec ceux de Jean Marie Le Pen. Mais alors que ceux du second sont à juste titre vilipendés, ceux du premier sont encensés. Un étron est un étron de quelque cul qu'il chût.