samedi 7 novembre 2009

Journal belge raille "l’artillerie lourde des lobbies pro-israéliens"

"Ses fantassins sont israéliens. Mais l’artillerie lourde est aux mains des lobbies pro-israéliens de Washington."

Le quotidien belge Le Soir gratifiait hier ses lecteurs d'un titre choc :

"Les lobbies en guerre contre le juge"
"Essentiel:
- Deux puissants lobbies pro-israéliens se déchaînent contre le rapport Goldstone accusant Israël et le Hamas de crimes de guerre.
- Rapport que les parlementaires n'avaient pas lu ..."

Le même article a été publié par Le Temps suisse, sous le titre "Rapport Goldstone: la guerre des lobbies fait rage".

C'est l'espagnol Luis Lema, correspondant du quotidien à New York, lui-même auteur (ça ne s'invente pas !) d'un livre sur ... l'intifada "Couvrir Le Désastre - Un Regard Sur L'intifada". Encore un livre qui ne fera pas date mais qui ira rejoindre la cohorte d'autres écrits par des Européens sur le même sujet inépuisable.

Inutile de dire que Luis Lema, tout comme son confère du Soir Baudouin Loos, trouve le rapport Goldstone admirable.

Dans l'article, Lema raille les fieffés coquins de l'ADL, en particulier Abraham Foxman :

"Le chef de l’ADL ne peut se résoudre à croire que Goldstone soit "un juif honteux": il n’a pu qu’être aveuglé par une "dangereuse naïveté". Abraham Foxman lui demande donc de répudier le rapport qui porte son nom. "Pensez-y!", conseille-t-il en achevant sa missive aux allures de menace d’excommunion."

Loin de cette caricature simplificatrice, les lecteurs de ce site pourront juger par eux-mêmes le contenu de la lettre de M. Foxman "ADL's Foxman To Richard Goldstone: Repudiate The Report". Un écrit en tout point remarquable et digne, dans lequel il n'est nullement question de "juif honteux" ni de "menace d'excommunion".

Vient ensuite le tour du redoutable LOBBY, l'AIPAC.

"Le simple fait [pour les membres du Congrès] de ne pas déplaire à ce puissant lobby a sans doute été déterminant" qui "dans un vote soviétique, le Congrès américain a passé par 344 voix contre 36 une résolution "non contraignante" dénonçant le caractère "irrémédiablement biaisé" du rapport et appelant les Etats-Unis et la communauté internationale à ne lui donner aucune suite. Un porte-parole de l’AIPAC "applaudit" cette décision en précisant qu’elle est "le fruit de la pure volonté des membres du Congrès", alors que Lema laisse entendre que c'est le fruit des menées de l'AIPAC...

Lema n'épargne pas les membres du Congrès dont il fait un portrait peu flatteur :

"Les parlementaires américains n’avaient pas lu ce rapport de 575 pages. Ils ont dû le reconnaître à mots couverts après que le juge Goldstone leur a demandé de clarifier leurs affirmations selon lesquelles les crimes supposés du Hamas n’y étaient pas mentionnés. Le simple fait de ne pas déplaire à ce puissant lobby à sans doute été déterminant."

Mais tout n'est pas sombre. Le journaliste a trouvé quelques bons juifs. De vrais "experts" comme un certain Henry Siegman, apprécié car il "ne mâche pas ses mots", et qui déclaré que "la réaction d'Israël aux efforts de paix n'est rien moins que pathologique". [Le passage sur Siegman - qui vient s'ajouter à tout le reste - n'a heureusement pas été repris par Le Temps.]

Pour couronner le tout, il y a bien entendu l'admirable J Street, un lobby comme il faut car il s'est "donné pour tâche de servir de contrepoids à ces géants".

Que les Américains aiment sincèrement Israël et comprennent les dangers liés au terrorisme auxquels ce démocratique pays fait face semble être incompréhensible pour le journaliste. Lire à ce sujet l'essai érudit de Walter Russell Meade "The New Israel and the Old, Why Gentile Americans Back the Jewish State", Foreign Affairs, juin/août 2008.

Voir également (hier) dans La Libre Belgique :
-
Bichara Khader: la Turquie "fait grincer les dents d’Israël"

1 commentaire :

Gilles-Michel DEHARBE a dit…

Luis Lema est plus "lourd" que les lobbies !!

Comment les immigrants juifs auraient-ils pu contribué à façonner cette Amérique qui, à l'origine, n’a pas voulu d’eux ?

Ils s’appelaient Levi Strauss, Warner ou Fox et bien d’autres ont suivi leur lancée. Ils ont laissé leurs marques sur la culture populaire de ce pays rêvé. Le premier a commencé comme petit colporteur en Californie auprès des chercheurs d’or et sur ses traces, le « jean denim » s’est imposé à la planète entière. Les seconds ont fondé un empire en commençant par gager la montre de leur père pour obtenir une poignée de dollars… Fox, Warner, Paramount, Metro Goldwyn-Mayer, Universal… autant de noms qui s’égrènent sur les échelons de la success story américaine, suivis par de nombreux autres, non moins célèbres, et qui seront traînés dans la boue par l’hystérie maccarthyste et les relents d’antisémitisme récurrents.

On imagine souvent un lobby juif puissant tirant les ficelles de l’Amérique. Évaluée à seulement deux pour cent de la population américaine, la communauté juive est plutôt menacée de disparition entre 2050 et 2075, comme l’affirment d’éminents sociologues américains ?

N'oublions pas qu'aux États-Unis, 295 millions de citoyens ne sont pas juifs et qu'AIPAC ne représente pas tous les Juifs qui sont généralement plus à gauche. En effet, la plupart d'entre eux ne sont pas affiliés. En outre, le pilier essentiel du lobby pro-israélien est le lobby chrétien sioniste. Les Chrétiens évangéliques sont environ 50 millions. Le lobby chrétien est très influent. Allez sur leur site : Christians United for Israel (CUFI). Ils veulent encourager le retour de tous les Juifs en Israël afin de permettre la seconde venue du Christ (pré-millénaristes) et sont des fervents (plus que les Israéliens) du Grand Israël qui serait, selon eux, fidèle à celui où le Christ a vécu.
(inconsciemment, pour cette raison, Lema, peut-être, a parlé d'excommunion !!)

Non seulement il existe encore des sentiments anti-juifs aux États-Unis, mais la résurgence des manifestations anti-juives inquiète les nombreuses organisations et les communautés juives américaines, en particulier depuis le 11 septembre.
Cependant, les organisations juives, à l'instar de l'American Jewish Committee, de l'Anti Defamation League, du Centre Simon Wiesenthal et de l'American Jewish Congress – pour ne citer que les principales –, demeurent vigilantes et n'hésitent pas à dénoncer les manifestations d'antisémitisme.

En 2006, le rapport Walt-Mearsheimer a renouvelé ces inquiétudes en fournissant une étude marquée du sceau universitaire et accusant le lobby pro-israélien, en particulier l'AIPAC, d'influencer la politique étrangère américaine. Ce sont des idées qui ne sont pas nouvelles mais qui, à cause de l'appartenance universitaire de leurs auteurs, ont suscité une vive controverse. Or, dénoncer l'influence du lobby pro-israélien comme nuisant à l'encontre de “l'intérêt national” traduit une incompréhension de l'élaboration des intérêts nationaux dans des démocraties pluralistes. En effet, les lobbies ethniques sont des acteurs à part entière de la politique étrangère américaine. Par exemple, le lobby pro-arabe, élaboré sur le modèle du lobby pro-israélien, s'efforce de contrebalancer son influence. Autre facteur d'inquiétude pour le leadership juif américain, les campagnes antisionistes sur les campus américains, face auxquelles se mettent en place des stratégies pour lutter contre la désinformation. Finalement, tout cela prouve que face aux nombreuses incertitudes auxquelles les Américains juifs sont confrontés, il existe, au sein de ce laboratoire d'expériences que sont les États-Unis, d'extraordinaires forces de renouveau, sur le plan culturel, sociologique, politique et religieux.