"La méthodologie employée par le lobby arabe est donc totalement incompatible avec la gouvernance démocratique, car elle ne reflète pas la volonté du peuple mais plutôt la corruption de l'élite, tandis que le lobby israélien semble fonctionner en respectant les paramètres du processus démocratique. Pourtant, si beaucoup a été écrit sur le caractère prétendument corrosif du lobby israélien, le puissant lobby arabe a largement échappé à la surveillance et la critique. Ce livre important contribue ainsi à ouvrir le débat en éclairant le côté sombre des efforts massifs et largement non-démocratiques du lobbying arabe pour influencer la politique américaine au Moyen-Orient."
On se souviendra de l'énorme succès qu'a connu en Europe le livre John Mearsheimer et Stephen Walt "Le Lobby Israélien". A peine sorti aux U.S., il fut traduit en français. Il est permis de douter que le livre de Mitchell Bard sur le lobby arabe: l'alliance invisible qui sape les intérêts américains au Moyen-Orient provoquera le même engouement.
Source: Daily Beast - traduction d'extraits d'un article d'Alan Dershowitz, The Arab Lobby Rules America, concernant l'ouvrage de Mitchell Bard sur le lobby arabe aux États-Unis The Arab Lobby: The Invisible Alliance That Undermines America's Interests in the Middle East.
Le lobby pro-Israël et le lobby pro-arabe (ou plus exactement les lobbies, car il en existe plusieurs de chaque côté) sont en effet puissants, mais il y a une différence de taille entre les deux et cette différence est au coeur même du rôle du lobbying dans une démocratie. Bard l'explique ainsi:
"L'une des caractéristiques distinctives et marquantes du lobby arabe est qu'il ne jouit d'aucun soutien populaire. Tandis que le lobby israélien a des centaines de milliers de sympathisants et que les sondages d'opinion les uns après les autres confirment l'énorme fossé qui existe entre le soutien à Israël et celui aux nations arabes/Palestiniens. Le lobby arabe n'a pratiquement pas de militants de base et ne bénéficie pas de la sympathie du public.
Ses membres les plus puissants sont en général des bureaucrates qui ne représentent que leurs propres points de vue personnels ou ce qu'ils estiment être leurs intérêts institutionnels, ainsi que des gouvernements étrangers qui ne défendent que les intérêts nationaux de leurs pays, et pas ceux des États-Unis. Ce qui leur fait défaut en capital humain en termes de partisans américains est compensé par des ressources pratiquement illimitées qui leur permettent d'essayer d'acquérir ce qu'ils n'arrivent généralement pas se procurer par la force de leurs arguments".
Cette distinction est un facteur critique dans une démocratie. Défendre Israël (il ne s'agit pas de défendre l'ensemble de ses politiques) est facile pour les lobbyistes pro-israéliens, en particulier auprès des représentants élus. Voter en faveur d'Israël est populaire non seulement dans les zones à forte concentration d'électeurs juifs, mais dans tout le pays, parce qu'Israël est populaire chez les chrétiens évangéliques en particulier, et auprès du public en général, mais évidemment pas chez tout le monde. Les lobbies qui reflètent la volonté du peuple sont une partie importante du processus démocratique. Ainsi, l'Association américaine des retraités (AARP), le principal groupe de pression des personnes âgées, est très puissant car beaucoup de personnes âgées dans ce pays veulent protéger la sécurité sociale, Medicaid, ainsi que d'autres avantages. Le National Rifle Association (NRA) est un lobby puissant précisément parce que de nombreux Américains, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, tiennent à leurs armes. Et l'American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) est un lobby puissant parce que les Américains, en général, soutiennent la seule démocratie du Moyen-Orient qui est également l'allié fiable de l'Amérique
Comment expliquer compte tenu de ces faits que le lobby arabe, et plus particulièrement le lobby saoudien, soit si puissant? L'Arabie saoudite ne jouit de pratiquement aucun soutien dans la population américaine. En effet, il est largement vilipendé pour son exportation de terroristes comme Oussama ben Laden, sa manipulation du prix du pétrole, ses politiques anti-chrétiennes et antisémites, l'absence totale de tout semblant de liberté de parole ou de dissidence, ses formes primitives de punition qui incluent la lapidation et l'amputation. Pourtant, comme le démontre Bard, dans un conflit opposant les deux c'est le lobby saoudien qui bat le lobby pro-israélien encore et encore, par exemple en ce qui concerne la vente d'armes sophistiquées à un régime qui ne dispose même pas des compétences techniques pour les utiliser et en ce qui concerne le transfert de l'ambassade des États-Unis à Jérusalem. Même à l'heure actuelle, l'Arabie saoudite est en plein lobbying pour l'achat de plusieurs milliards de dollars d'armes, et il est fort probable qu'elle réussira à les obtenir en dépit des objections d'Israël.
Comment se fait-il qu'un lobby qui n'a aucun soutien populaire parvient à exercer un telle influence dans un pays démocratique? Le secret est très simple. Le lobby arabe en général, et les Saoudiens en particulier, font peu d'efforts pour influencer les représentants du peuple démocratiquement élus, en particulier les législateurs. Encore une fois, lisons Bard:
"Les Saoudiens ont adopté une stratégie différente de celle du lobby israélien. Leur approche de lobbying est celle du "top-down" [des dirigeants vers la base] plutôt que le "bottom-up" [de la base vers les dirigeants]. Comme le décrit le lobbyiste rémunéré J. Crawford Cook en fixant sa stratégie proposée pour le royaume: l'Arabie saoudite a besoin d'influencer les rares personnes qui influencent les masses, plutôt que d'influencer les masses auxquelles ces quelques rares responsables doivent rendre des comptes" ('Saudi Arabia has a need to influence the few that influence the many, rather than the need to influence the many to whom the few must respond.'").
[...]
La méthodologie employée par le lobby arabe est donc totalement incompatible avec la gouvernance démocratique, car elle ne reflète pas la volonté du peuple mais plutôt la corruption de l'élite, tandis que le lobby israélien semble fonctionner en respectant les paramètres du processus démocratique. Pourtant, si beaucoup a été écrit sur le caractère prétendument corrosif du lobby israélien, le puissant lobby arabe a largement échappé à la surveillance et la critique. Ce livre important contribue ainsi à ouvrir le débat en éclairant le côté sombre des efforts massifs et largement non-démocratiques du lobbying arabe pour influencer la politique américaine au Moyen-Orient.
- The Arab Lobby, A new book explores the ‘petrodiplomatic complex’ and Saudi influence on U.S. foreign policy
Ce site est dédié aux millions d'Européens qui, malgré d'incessantes campagnes de désinformation, ne croient pas que les Juifs ne sont capables que du pire; ne dissimulent pas leur antisémitisme dans le langage de l'antisionisme; et savent qu'Israël représente ce qu'il y a de meilleur dans une démocratie.
2 commentaires :
Votre blog est souvent solidement documenté. Je ne suis pas d'accord sur tout mais ce que vous dites sur des gens comme Siné ou Dieudonné me semble juste. Je ne suis pas certain que l'on puisse mettre quelqu'un comme Jean Bricmont dans le même sac, mais l'important est que vous argumentiez. Ca change des slogans à répétition, qu'ils soient favorables ou non à Israël.
Selon moi, on doit mettre Bricmont dans le même sac. Cette personne est comme Dieudonné un malade obsessionnel contre tout ce qui touche de près ou de loin à Israël.
Je m'en suis rendu compte pendant la conférence de Tariq Ramadan et Malek Chebel à l'ULB. Au lieu de poser une question en rapport avec le sujet, il fait une intervention de +/- 2 minutes qui consiste uniquement en diablisant la politique USA mais surtout Israël et qui n'avit RIEN à faore avec le sujet. Du coup il partait de la salle, ayant fait son "devoir".
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