jeudi 8 novembre 2012

Adolf Hitler était un grand blagueur et aimait rigoler

Nigel Jones écrit dans The Spectator (The Fuhrer was not amused) une recension sur le livre de Rudolph Herzog, qui est le fils du grand réalisateur allemand Werner Herzog, sur l'humour dans l'Allemagne hitlérienne qui se veut à la fois une anthologie de blagues allemandes sous le Troisième Reich, une analyse de leur évolution comme arme de résistance contre le régime nazi, un aperçu de la façon dont le peuple le plus industrieux et inventif d'Europe a capitulé devant une idéologie démente, et comment l'humour combiné avec une lourde dose d'ironie était le seul moyen pour confronter cette terrible erreur. Les blagues qu'Herzog cite étaient les seules armes dont disposait la majorité des gens pour résister à résister à ce régime terrible. Mais, en racontant des blagues politiques, les Allemands mettaient littéralement leur vie en danger. Pour avoir en 1943 raconté une blague à un voisin qui s'est empressé d'aller la dénoncer à la Gestapo Marianne K. fut condamnée par le terrible juge Roland Freisler, président du célèbre Tribunal du peuple (Volksgerichtshof), à être guillotinée. Or le mari de Marianne K. était mort en se battant pour Hitler. Elle avait donc d'excellentes raison d'en vouloir au régime et aurait dû mériter un peu d'indulgence de sa part. Voici la blague:

"Hitler et Goering surveillent leur royaume du haut de la tour de la radio de Berlin. Hitler confie à Goering que les Berlinois ont la mine renfrognée et qu'il veut les faire sourire. Goering réfléchit un moment, puis suggère gentiment: "Pourquoi ne sauteriez-vous pas dans le vide?"

La grande révélation du livre de Herzog est que les plaisanteries populaires - à la fois mordantes et qui coupaient l'herbe sous les mensonges pompeux du régime et qui démontrent qu'à l'intérieur des bottes les pieds des dirigeants étaient en réalité fait d'argile - étaient également une caractéristique de l'Allemagne nazie.

Contrairement à la légende populaire, il s'avère qu'en privé Hitler était un plaisantin. L'écrivain Nicolas Mosley, qui est le fils aîné de Sir Oswald Mosley, a raconté à l'auteur de l'article que sa belle-mère Diana Mosley, qui était à Berlin pour demander des fonds pour soutenir le mouvement fasciste en Grande-Bretagne, fut conviée par Hitler à la Chancellerie du Reich. Diana a décrit Hitler comme "un marrant". Il l'avait faire rire aux éclats, entre autres, avec son imitation de Mussolini. Il est clair que Hitler aimait rigoler.


Les camps de concentration et de l'Holocauste n'étaient certainement pas un sujet de plaisanterie; néanmoins des blagues sur le sujet circulaient. Une des révélations du livre de Herzog est le niveau de connaissance dans la population de ces caractéristiques de la domination nazie (ils savaient donc???). Un bon exemple sont les 'Fluster witzen' - les blagues racontées en chuchotant de peur d'être entendu par des oreilles indiscrètes comme celle-ci:

"Un gars dans un camp de concentration tente de se suicider. D'abord, il se pend, mais la corde est tellement pourrie qu'elle casse. Puis il enfonce la tête dans un four à gaz, mais le gaz est éteint entre deux et cinq heures. Puis il essaie de manger les rations du camp. Et ça marche à merveille".

Sans surprise, les Juifs eux-mêmes plaisantaient très cruellement sur leur propre sort:

"Combien de types de Juifs y a-t-il? Deux: les pessimistes et les optimistes. Tous les pessimistes se sont exilés, tous les optimistes se trouvent dans des camps de concentration".


Nigel Jones is co-founder and director of www.historicaltrips.com he is currently writing a study of 1914 for Head of Zeus publishing.

Dead Funny: Telling Jokes in Hitler’s Germany by Rudolph Herzog (Melville House)

2 commentaires :

prof a dit…

C'est bien vrai, Hitler était un grand comique. Ces blagues étaient d'un goût certain. Sûrement des blagues sur les juifs.

Même si cela était le cas, cet homme me fait vomir. Ce que retient et ce que dois retenir l'humanité de cet homme ce n'est pas son humour mais l'horreur et le dégoût.

Anonyme a dit…

Paradoxe de ces temps troublés, face au danger bolchevique la communauté juive allemande est à l’unisson. Le rabbin Léo Baeck déclare en public à la fin mars 1933 : « La révolution allemande et nationale que nous vivons en ce moment montre deux directions qui tendent à se rejoindre : la lutte pour surmonter le bolchevisme et celle qui vise à rénover
l’Allemagne. Comment se situe le judaïsme face à ces deux objectifs ? Le bolchevisme étant un mouvement athée est l’ennemi le plus violent et le plus acharné du judaïsme (…) Un Juif qui se fait bolcheviste est un renégat. L’idéal et la nostalgie des Juifs allemands est bien la rénovation de l’Allemagne ».

Cette « nostalgie » pousse certains intellectuels Juifs à aller jusqu’à déclarer qu’ils auraient approuvé le régime nazi s’il n’avait pas été antisémite. En témoignent ces mots du rabbin Elie Munk : « C’est à partir du judaïsme que je rejette la doctrine marxiste, je me reconnais dans le socialisme national une fois ôtée sa composante antisémite. Sans l’antisémitisme, le socialisme national trouverait ses plus chauds partisans chez les Juifs fidèles à leur tradition ». Au vu de toutes ces prises de positions, est-il exagéré de conclure que pour la plupart des acteurs l’arrivée du national-socialisme au pouvoir a plutôt été considérée avec sympathie et pour le moins n’a pas été combattue ? Certes des voix se sont élevées pour dénoncer les emprisonnements d’opposants politiques, les renvois arbitraires de fonctionnaires et autres dérives inadmissibles d’un régime totalitaire qui s’installe. Le soulagement de voir l’Allemagne s’éloigner d’un chaos total qui l’aurait détruite a relégué ces mesures scélérates au second plan.

Hitler n’a pas eu de soucis à se faire du côté des démocraties occidentales. Déjà en décembre 1930 dans le Populaire, Léon Blum écrivait : « Je crois que l’astre hitlérien est déjà monté au plus haut de sa course, qu’il a touché son zénith». D’ailleurs, ajoute-t-il, si un jour « l’absurde baladin du racisme arrivait tout de même au pouvoir, il sentirait tomber sur lui le lourd manteau de prudence et l’on pourrait s’attendre à l’une de ces métamorphoses opportunes comme il s’en produit souvent ». Après le boycott du 1er avril 1933, Léon Blum met publiquement en garde contre «toutes réactions nationalistes». Dans la grande tradition de vœux pieux imprégnés de rhétorique humanitaire, il estime qu’il vaut mieux répondre à la force par la « révolte des consciences ».