jeudi 13 février 2020

"Si j’étais juif, je partirais vers des cieux plus cléments" (Nicolas De Pape)


"Mais que souhaitent les Européens? Faudra-t-il, pour rendre l'Islam soluble dans l'Europe, que le Vieux Continent se désenjuive? Les Juifs seraient-ils le seul obstacle au grand accouplement islamo-européen? La réponse à cette question est imminente. Car, que dit-on lorsqu'un Juif est agressé par un Arabe? "Cela ne sert pas la cause arabo-musulmane." Il n'y a plus guère de question juive. Les Juifs n'intéressent plus personne sauf dans la mesure où ils interfèrent sur la question arabo-musulmane, laquelle est en Europe le grand enjeu de ce XXIe siècle." (Nicolas De Pape, "Sur la nouvelle question juive", Texquis, 2020, p.p. 86-87).  
Drieu Godefridi - entretien avec Nicolas De Pape, auteur de "Sur la nouvelle question juive" @ Causeur:
Causeur. Votre titre m’a interpellé. En quoi cette “question” est-elle actuelle ? Y a-t-il vraiment une “question juive” qui se pose, en 2020, en Europe ? 
Nicolas De Pape. Mon essai s’inscrit dans la filiation de Jean-Paul Sartre dont les Réflexions sur la Question juive avaient fait grand bruit à l’époque. Son argument principal était le suivant: "Ce sont les chrétiens qui ont créé le juif en provoquant un arrêt brusque de son assimilation et en le pourvoyant malgré lui d’une fonction où il a, depuis, excellé. Mais de ce souvenir les sociétés modernes se sont emparées, elles en ont fait le prétexte et la base de leur antisémitisme. Ainsi, si l’on veut savoir ce qu’est le juif contemporain, c’est la conscience chrétienne qu’il faut interroger: il faut lui demander non pas « qu’est-ce qu’un juif?" mais "qu’as-tu fait des juifs?" Le juif est un homme que les autres hommes tiennent pour juif: voilà la vérité simple d’où il faut partir."

Au 21e siècle, qu’avons-nous fait des Juifs? Avec l’arrivée massive d’une immigration musulmane en Europe et l’importation du conflit israélo-palestinien et la mise en place d’une société multiculturelle qui considère que l’Islam est la religion de l’opprimé, quelle est la place résiduaire des Juifs en Europe? Les Juifs ne sont plus que les "anciens opprimés" dans l’inconscient collectif européen. La paupérisation a reculé parmi les communautés juives assimilées à la "bourgeoisie". Face aux avancées de l’islamisme et de l’islamogauchisme, quelques intellectuels juifs ont été les premiers lanceurs d’alerte posant la question de la pérennité d’une Europe laïque, séculière. Mais ils se sont posés immédiatement la question de la place des Juifs dans cette Europe-là. Les Juifs sont-ils devenus les empêcheurs de danser en rond d’une société multiethnique qui nie toute référence identitaire ou toute référence nationale? Gilles-William Goldnadel n’hésite pas à dire que "Hitler était blanc. Les Blancs doivent donc disparaître. Or les Juifs sont les super-blancs." Dans Soumission, Michel Houellebecq décrit une France qui s’apprête à voter pour un président de la République à la tête d’un parti "musulman modéré". Le héros, un professeur d’université, s’apprête à se convertir à l’Islam pour monter dans la hiérarchie. Sa petite amie du moment est une jeune Juive française qui s’apprête à faire son alya (montée en Israël) devant l’évolution politique délétère de la France. Houellebecq a vu juste, une nouvelle fois: y a-t-il encore une place pour les Juifs dans une Europe qui s’islamise ? […]

Les raisons électoralistes sont réelles. Des politiciens avouent en privé se sentir obligés de soutenir la cause palestinienne, d’inhiber leur dénonciation de la recrudescence de l’antisémitisme et de condamner Israël de manière "automatique" pour ne pas mécontenter leur électorat musulman (majoritaire en voix dans certaines villes de France ou de Belgique). 
Mais comme vous le supposez, il y a des motifs plus sombres. En pleine seconde Intifada, Françoise Giroud, elle-même de gauche, a immédiatement saisi la trahison des élites. […]

Pensez-vous que l’exil de la majorité des Juifs d’Europe peut encore être évité? L’Europe est-elle condamnée à se trouver "Judenfrei" — ou Judenrein — comme l’est devenue l’Afrique du Nord? 
C’est la thèse d’Alain Finkielkraut. Le départ, quasi tous les Juifs y pensent sauf quelques juifs antisionistes pratiquant la haine de soi… Déjà, les plus riches fuient aux Etats-Unis, les "moyennement riches" en Israël, les autres déménagent vers des municipalités plus "jew-friendly". Les plus pauvres demeurent dans les cités "sensibles" et rasent les murs. […] 
Le constat est terrible mais, à la lumière de nombreux attentats ou fait-divers récents, un Juif reconnaissable ou observant n’est plus en sécurité en Europe ! Le scandale est que… personne ne trouve que c’est un scandale.

Il y a tout juste 75 ans était libéré le camp d’Auschwitz, probablement l’un des pires lieux de l’abomination dont l’homme est capable. 75 ans plus tard, l’Europe se vide à nouveau de ses Juifs. Ma question en conclusion : l’Europe mérite-t-elle ses Juifs? 
Non. Si j’étais juif, je partirais vers des cieux plus cléments. Après avoir accueilli 1,5 million de Syriens essentiellement pour combler des pénuries de main-d’œuvre, l’Allemagne constate qu’une part substantielle d’entre eux est antisémite. Heiko Maas, ministre allemand des Affaires étrangères, s’inquiétant de la résurgence de l’antisémitisme dans son pays constate dans Der Spiegel (26 janvier 2020): "Nous devons prendre des mesures d’urgence pour éviter un départ massif des Juifs d’Allemagne." Peut-être fallait-il y penser plus tôt?
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