Imre Kertész (1929-2016), écrivain hongrois, survivant des camps de concentration et lauréat du prix Nobel de littérature en 2002:
"Je n'ai jamais pensé au fait que j'étais juif, sauf quand j'étais en danger. Et encore, ma judéité ne se manifestait pas dans ces cas-là comme quelque chose "d'intérieur", mais toujours comme une négativité, une limitation, une détermination extérieure - de même qu'on se définit comme nourriture vivante face à un requin dans l'océan ou un tigre dans la jungle. Mais on ne peut pas se contenter d'être la nourriture des autres. Je n'ai jamais pensé à la religion : je ne la comprends tout simplement pas […]. Pourtant, ma judéité m'a permis de vivre l'expérience universelle d'une existence humaine assujettie au totalitarisme. Donc si je suis juif, je dis que je suis négation, négation de tout orgueil humain, négation de toute sécurité, des nuits tranquilles, de la vie spirituelle paisible, du conformisme, du libre choix, de la fierté nationale - je suis la page noire du livre des triomphes qui ne laisse pas transparaître l'écriture, je suis une négation, non pas juive, mais une négation humaine universelle, un mané, theckel, pharès sur le mur de l'oppression totale."Imre Kertész, Journal de Galère, traduit du hongrois par Natalia Zaremba-Huzsvai et Charles Zaremba, Actes Sud, 2010, p.p. 50-51.
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