lundi 28 mai 2018

Denis Jeambar: A part les Palestiniens, aucune civilisation au monde commet le crime de placer femmes et enfants en première ligne


Denis Jeambar, journaliste et écrivain:
"Du passé on s'exonère, du présent on se crédite. Sans jamais se demander si on ne reproduit pas les mêmes fautes d'analyse.  Les cauchemars que l'on dénonce n'ont donc qu'un coupable: Israël.  Le procès est manichéen.  Il ignore les conditions de création de cet État et le désir, à peine dissimulé, de ses voisins arabes de voir les Juifs finir, un jour ou l'autre, à la mer.  L'illégitimité de l'État hébreu est en train de devenir un fait acquis dans l'inconscient collectif de quelques dictateurs à penser.  Le Juif est, de nouveau, le fauteur de troubles.  Vieille histoire, venue du fond des âges.

Personne, du coup, ne prend le risque de rappeler que le plus grand exterminateur de Palestiniens fut le roi Hussein de Jordanie: le Septembre noir de 1970, véritable massacre des innocents, est tombé dans les oubliettes.  Israël en porterait même la responsabilité.  La guerre des Six Jours et la modification des équilibres qu'elle a provoquée dans la zone auraient contraint Hussein à agir pour préserver l'unité de son pays et son pouvoir soumis à la pression d'une majorité palestinienne désespérée de ne pouvoir retrouver sa terre promise cisjordanienne.  Fermez le ban!

Impossible, également, de s'étonner que des hommes placent en première ligne des femmes et des enfants.  Aucune civilisation au monde ne commet ce crime. Même face au désespoir absolu.  Si l'on avance ce fait pour s'en indigner, l'argument  est aussitôt retourné: c'est bien la preuve que le désespoir palestinien va au-delà du désespoir."
Les dictateurs à penser et autres donneurs de leçon, éditions du Seuil, 2004, p. 95.

Aucun commentaire :