jeudi 18 janvier 2018

G. Bensoussan: "Il y a en Europe une 'part juive' impossible à assumer depuis toujours"


Georges Bensoussan, historien spécialiste d'histoire culturelle de l'Europe des XIXe et XXe siècle et, en particulier, des mondes juifs (histoire culturelle du sionisme et de la Shoah):
"Il y a en Europe une "part juive" impossible à assumer depuis toujours et qui est devenue une impossibilité d'assumer l'Etat d'Israël.  Face aux vraies menaces génocidaires qui viennent du Proche-Orient contre Israël, il semble bien que l'Europe trouvera toutes les raisons du monde pour ne pas lever le petit doigt en cas de danger extrême.  Ce ne sera pas cette fois un génocide en acte, mais une non-assistance à peuple en danger.

Sur ce plan-là, les choses vont plutôt dans le mauvais sens.  Il y a plusieurs raisons à cela.  D'abord, quelque chose de très anciennement ancré dans la culture européenne et qui est à l'origine du génocide.  Il y a ensuite un facteur lié à la culpabilité née de la Shoah, laquelle n'a pas seulement induit une attitude faite d'empathie et de compassion, mais a aussi provoqué une culpabilité que l'on pourrait qualifier de "vengeresse".  Pour reprende une formule célèbre tirée d'un film d'Axel Corti: "Ils ne nous pardonneront pas le mal qu'ils nous ont fait".

Derrière les grandes manifestations de compassion chaleureuse organisées autour du 27 janvier, il me semble que nous sommes en présence, en Europe, d'une sourde culpabilité qui peut parfois se transformer en agressivité.  Celle-ci ne se focalise pas forcément sur les Juifs en Europe, mais bien davantage sur l'Etat d'Israël, lequel représente aujourd'hui un facteur-clé de l'identité juive, même pour des gens qui ne sont pas sionistes.


Un troisième facteur enfin entre en jeu, c'est cette aspiration (en soi évidemment légitime) à la paix, si fortement chevillée au cœur des Européens, et qui leur rend impensable l'idée de la guerre  Les voici donc incapables d'imaginer qu'on puisse un jour devoir se battre pour défendre ses valeurs et son existence, faire couler le sang et mettre sa vie en péril.  Psychiquement et moralement, l'Europe semble désarmée, dans une sorte d'état munichois avancé.  Du coup, Israël est considéré à plusieurs titres comme un Etat gêneur, fauteur de guerre d'une part, culpabilisant d'autre part, parce qu'offrant l'image d'une nation prête encore à se battre pour défendre ses valeurs et sa vie."
Regards, Centre Communautaire Laïc Juif, Bruxelles, 08/05/2007.

1 commentaire :

Jacques galazka a dit…

C est la verite , cela permet de mieux comprendre le comportement de cette europe paralysee par l antisemitisme profond partage avec ses amis et allies arabes.
Comme toujours , les derniers a comprendre , sont les Juifs .