dimanche 24 février 2013

Guy Millière réagit aux méthodes journalistiques de Caroline Fourest

Un excellent texte de Guy Millière @ Dreuz.  Les documentaires "Les réseaux de l'extrême" donnent une image affligeante du journalisme français et de la société française.

J’ignorais être cité dans les documentaires réalisés par Caroline Fourest "Les réseaux de l’extrême". Et je ne les ai pas regardés, jusqu’à ce qu’on me signale que j’apparaissais dans le quatrième épisode, appelé de manière éloquente, Les Naufragés de Sion. Dès le titre, on sent la vive sympathie de la dame envers les Juifs et envers Israël. Ce n’est pas de la haine, non: juste du mépris condescendant, du style de celui qui a fait traiter d’Israël de "petit pays de merde" par un ambassadeur de France, un soir, à Londres, il y a quelques années. Le mépris condescendant peut être plus efficace que la haine et y conduire subtilement, sans utiliser de mots grossiers. Et Caroline Fourest n’est pas grossière: elle se donne les apparences de l’objectivité. Mais ce ne sont que des apparences, bien sûr.

C’est une spécialiste du relativisme à la française. Si elle trouve des obsédés, elle voudra trouver des obsessions égales chez les victimes des obsédés. Si elle rencontre des gens haineux, elle fera tout pour détecter ou attribuer de la haine chez les victimes des gens haineux. Entre un assassin et un assassiné, elle cherchera l’équilibre. L’assassin est peut être coupable, mais l’assassiné est-il sans reproches ? C’est quelqu’un qui prend de la hauteur. A l’époque d’Auschwitz, elle aurait donné la parole à des nazis, mais elle aurait sans doute trouvé le moyen d’obtenir une autorisation pour visiter le ghetto de Varsovie et aurait demandé aux porteurs d’étoile jaune s’ils ne ressentaient pas de la colère envers les SS.

Caroline Fourest dépeint d’abord un ramassis sordide d’antisémites, en prenant soin de distinguer les crasseux, les pouilleux, les ignobles du type Faurisson et Dieudonné, que je considère moi-même comme des gens dont la place serait dans une poubelle dont je serais heureux de fermer le couvercle, puis elle parle d’Europalestine, le mouvement qui organise de temps à autres des petites nuits de Cristal en portant des chemises vertes, comme d’autres portaient des chemises brunes, et elle dit qu’Europalestine est un mouvement "rationnel": ce qui signifie, j’ose le penser, qu’il est rationnel à ses yeux d’organiser de petites nuits de Cristal en portant des chemises vertes à la place de chemises brunes. Ce qui signifie aussi, sans doute, qu’il est rationnel à ses yeux d’agresser et de diffamer des gens courageux et honorables tels que Sammy Ghozlan, et qu’il est rationnel aussi de m’avoir présenté dans un article comme l’inspirateur du criminel Anders Breivik. Face à un interlocuteur qui lui présente comme des actes de "résistance" les actes du Hamas, elle reste neutre, et reprend elle-même le mot de résistance. Si elle avait parlé de terrorisme, elle aurait cessé d’être impartiale. Lorsqu’elle montre des images d’Ahmadinejad, elle le décrit comme responsable d’une "féroce répression", mais se garde de citer ses propos génocidaires. L’impartialité, toujours.

Ayant montré des antisémites obnubilés par les Juifs et par Israël et des "antisionistes" décrits comme "rationnels", il lui fallait trouver le pendant. Elle le trouve en s’en prenant à la Ligue de défense juive: en oubliant pendant l’essentiel du temps de souligner que d’une part, c’est une organisation minoritaire, et d’autre part que son rôle essentiel, et pendant l’essentiel du temps est de se conduire de manière défensive. J’insiste pour les mal lisants, plus nombreux que les malentendants: DEFENSIVE. N’ayant montré aucun terroriste palestinien (elle ne parle jamais de terrorisme palestinien), elle montre par contre le seul, l’unique terroriste juif, Baruch Goldstein, et doit donc remonter à 1994 pour le trouver. Si elle avait dû citer rien qu’en les nommant les équivalents "palestiniens" de Baruch Goldstein, il lui aurait fallu davantage que les cinquante minutes du documentaire: seuls les naïfs penseront que c’est pour cela qu’elle ne l’a pas fait. N’ayant montré aucun acte d’agression antisémite commis par des antisémites en France et n’ayant donné la parole à aucune victime d’agression antisémite, pas même à la famille des victimes de Merah à Toulouse, elle montre par contre des victimes de la Ligue de Défense Juive: des gens qui ont reçu de la peinture rouge sur la tête. La peinture rouge est moins dangereuse que les couteaux des meurtriers qui ont égorgé les membres de la famille Fogel, que les bombes des auteurs d’attentats suicide, ou que les armes d’un quelconque Merah, mais c’est ainsi, Caroline Fourest préfère montrer la peinture rouge.

Puis elle passe à des gens sans aucun doute délirants à ses yeux, et suggère-t-elle, emplis de détestation envers les Arabes et les Musulmans: les fondateurs de Riposte Laïque, mon amie Bat Ye’or, et moi-même. J’ai déjà dit mes points d’accord et mes points de désaccord avec Riposte laïque, mais ce genre de chose n’intéresse pas la dame. J’ai déjà dit que je distinguais islam radical et islam modéré (ce qui me vaut des remarques acerbes de gens imaginant mieux connaître l’islam que moi), mais ce genre de chose n’intéresse pas la dame non plus. J’ai dit que je partageais les analyses de Bat Ye’or. Et je le redis ici. Et j’ajoute que les livres de Bat Ye’or sont fondés, documentés, rédigés avec le plus grand scrupule intellectuel, mais cela n’intéresse pas la dame, qui n’a sans aucun doute pas le centième de la connaissance du monde islamique qu’a Bat Ye’or. La dame ne s’intéresse pas davantage aux complexités des liens tissés entre l’Europe, le monde arabe et le monde islamique: elle n’a pas le temps de s’intéresser aux faits. Elle a une démonstration à faire et elle a à la faire à coups de serpe et à grandes enjambées par-dessus la connaissance. Elle veut être persuadée que des gens comme moi détestent les Arabes et les Musulmans, et que des gens comme Bat Ye’or ou moi-même sont délirants. Elle fait les questions et elle fait les réponses. Ce qui a le mérite de la cohérence.

Je constate ainsi que des images filmées il y a un an sont réduites à une minute, soigneusement choisie et soigneusement sortie de son contexte. Je constate que le cameraman qui a filmé ces images m’a filmé en plongée en s’efforçant de donner de moi une image assez laide. Tout cela est le hasard, incontestablement.

Le film se termine sur un entretien avec Richard Prasquier, qui lui, n’est pas filmé en plongée et sous un jour destiné à l’enlaidir. La dame doit préférer Richard Prasquier. Elle ne l’en incrimine pas moins: il a refusé d’inviter au dîner du Crif des gens qui soutiennent des organisations terroristes! Comment peut-il! Une fois de plus la dame ne parle pas de terroristes, cela va de soi : juste de gens qui sont anti-israéliens et, il faut le dire, une fois tombés les masques, assez antisémites. Ne pas inviter d’antisémites au dîner du Crif ? Quelle idée inepte!

Pas une seule seconde il ne sera question de l’islam radical, et, outre les propos d’Ahmadinejad, de ceux de Mohammed Morsi et d’une multitude de dirigeants islamistes. La charte du Hamas sera cité par Richard Prasquier, et uniquement par Richard Prasquier. L’histoire d’Israël ne sera pas évoquée, ne serait-ce qu’un centième de seconde. La guerre d’extermination que n’a cessé de mener le monde arabe contre Israël depuis plus de six décennies ne sera pas évoquée, ne serait-ce qu’un millième de seconde. L’histoire du "peuple palestinien" et de la "cause palestinienne" ne sera pas évoquée non plus, même un millionième de seconde.

Dans l’univers de la dame, il n’y a que des opinions. Il n’y a ni démocratie ni totalitarisme. Il y a des extrémistes juifs qui s’imaginent étrangement que des gens les détestent et veulent détruire Israël (faut-il être paranoïaque, non?): pour un peu, ils diraient qu’on a tué six millions de Juifs en Europe il y a sept décennies, et certains diraient même qu’on a tué trois enfants juifs à bout portant dans la cour d’une école à Toulouse, simplement parce qu’ils étaient Juifs. Ces gens n’ont aucune pudeur, non? Ils n’ont pas la hauteur de vue de la dame.

Et puis, en face des extrémistes juifs, il y a des extrémistes antijuifs. Tout est dans tout. Rien n’est dans rien. Et vice versa.

Le seul qui trouve grâce aux yeux de la dame, c’est un Juif israélien qui trouve que Mahmoud Abbas est sympathique et qui serait prêt, je l’imagine, à réciter par cœur les discours où Mahmoud Abbas fait l’éloge d’Amin Al Husseini et ceux où il retrace la bravoure de Dalal Mughrabi. Elle n’a pas accordé d’entretien à Shlomo Sand. C’est dommage. Il manque au tableau.

Les seuls qui semblent dignes de louange, ce sont les journalistes français. Pas certains journalistes français, non: tous les journalistes français. Et dire que certains journalistes français manquent d’impartialité, c’est faire preuve d’extrémisme selon la dame. Un journaliste français, selon la dame, est, par essence, intouchable, lumineux, génial, même s’il parle de ce qu’il ne connait pas, même s’il traite un enfant de trois ans qui vient d’être égorgé de "colon".  C’est grâce à des journalistes français qui traitent un enfant de trois ans qui vient d’être égorgé de "colon" qu’Allah est grand, comme dirait un auteur aujourd’hui oublié.

C’est grâce à des propos comme ceux qui ouvrent et ferment le film que les chaussures de tous les journalistes français sont bien cirées, et je ne doute pas que Caroline Fourest a des réserves de cirage en stock.

Je crois que le type qui m’a filmé il y a un an était juif et qu’il s’est présenté à moi à l’époque sans me dire ce qu’il faisait. Ce n’est pas le premier. Ce ne sera pas le dernier. Hélas.  

Et dire qu’il y a des gens qui regardent la télévision et qui pensent que tous les journalistes français sont géniaux…  En tout cas, Caroline Forest est une grande journaliste française. C’est évident. Et je m’en souviendrai.

Guy Millière

PS Je n’ai pas vu les trois autres épisodes des "réseaux de l’extrême". Je me conterai d’un seul épisode: il est des choses qu’il faut consommer avec modération.

3 commentaires :

Monique a dit…

J'ai déjà dit que les journalistes sont des personnes qui ont fait ce métier parce qu'ils ne savaient rien faire d'autre.

Pour répondre à ce monsieur qui semble très touché par ce que dit une journaliste de pacotille, je dirai que cela me remplit d'honneur et de joie sans égal de m'entendre dire que je suis raciste parce que je suis philosémite. Et il n'a pas de cynisme là-dedans. Il devrait essayer de faire pareil quand on l'attaque, il se sentirait alors serein et la paix, ça n'a pas de prix.
Si je suis raciste parce que j'aime les juifs, que j'aime Israël et que j'estime que les responsables de la guerre entre les israëliens et les palestiniens, ce sont d'abord les palestiniens, alors oui, je suis fière d'être raciste.

Depuis 60 ans, avec leur complots guerriers (notamment la guerre des Six Jours : Golda Meir avait été averti à temps qu'il y avait une coalition de pays arabes qui allaient attaquer Israël) et leurs attaques terroristes incessantes et barbares, les palestiniens poussent Israël à agir de façon déterminée, organisée et puissante (ce qu'eux n'arrivent pas à faire) et après ils viennent se morfondre, regimber et appeler au secours les autres pays avec tout le battage médiatique nécessaire et dans lequel des imbéciles de journalistes tombent à pied-joint.

Je ne comprends pas pourquoi les gens sont si gênés que cela d'être taxés de raciste par des soi-disant anti-racistes, tenant d'une soi-disant morale bien pensante, quand ces derniers détestent les juifs peu ou prou sionistes et voudraient mettre hors d'état de nuire, c'est-à-dire de penser, d'écrire, de parler et de manifester, ceux qui aiment Israël.
Mais, jamais, je ne toucherai un seul cheveu de ces gens-là (sauf dans le cas extrême de légitime défense) parce qu'ils me sont en très grande partie indifférents et que toute l'eau et tout le savon de la terre ne suffiraient pas à me laver les mains si je les touchais.

Après, j'estime que d'être tués dans des attentats ou à bout portant comme les petits enfants à Toulouse, n'a absolument rien à voir avec de la peinture qu'on vous verse sur la tête. En médecine comparative, l'un correspond à une petite égratignure sur une jambe alors que l'autre correspond à une, voir deux, jambes totalement déchiquetés et brûlés qui nécessitent en urgence une amputation.

Rudi a dit…

voici ses bonnes copines.. mais surtout pas les critiquer

http://www.huffingtonpost.fr/2013/02/13/femen-a-notre-dame-valls-denoncent-provocation-inutile_n_2674848.html

Rudi a dit…

voici ses bonnes copines.. mais surtout pas les critiquer

http://www.huffingtonpost.fr/2013/02/13/femen-a-notre-dame-valls-denoncent-provocation-inutile_n_2674848.html