Texte paru dans le Wall Street Journal - traduction française par Pierre Raiman du blog Autour de la Liberté
"Depuis la 2e Guerre Mondiale, nous avons été pris du désir passionné de comprendre comment se sont produits les génocides, établis les Etats terroristes et déclenchées les guerres mondiales, afin d’imaginer comment les prévenir dans le futur.
Avant tout nous avons cherché les réponses à quelques questions essentielles. Pourquoi l’Occident a échoué à percevoir la catastrophe qui survenait? Pourquoi y eut-il si peu d’efforts pour refouler la marée fasciste? Et pourquoi presque tous les dirigeants Occidentaux et tant d’intellectuels ont traité les fascistes comme s’ils étaient des dirigeants politiques normaux et non les révolutionnaires violents qu’ils étaient pourtant? Pourquoi les principales victimes désignées, les Juifs, eux aussi échouèrent à comprendre l’ampleur de la menace? Pourquoi la résistance fut-elle si rare?
Les réponses apportées le furent généralement autour de deux idées. L’unicité du mal et l’absence de précédent historique. L’Italie et l’Allemagne étaient deux des nations les plus civilisées et cultivées du monde. Il était difficile d’apprécier jusqu’à quel point un mal si terrible s’était emparé de pays qui avaient été ceux de Beethoven, Kant, Dante et Rossini.
Dès lors comment blâmer les dirigeants, sans même parler des victimes, de n’avoir pas deviné un mal qui était totalement nouveau, comme les massacres de masse systématiques à grande échelle ou l’apparition d’une menace mortelle sur la civilisation tout entière? Jamais jusqu’alors n’avait existé un plan organisé à ce point pour la destruction d’une "race" entière. C’est pourquoi il était presque impossible de le comprendre avant qu’il ne se réalise. Et même pendant qu’il se réalisait.
Cet échec à comprendre ce qui se passait prit la forme bien connue du refus systématique d’admettre les plans de l’ennemi. Les rodomontades d’Hitler, que ce soit dans Mein Kampf ou lors des meetings nazis étaient souvent sous-estimées et qualifiées de politiques démagogiques destinées à accroître et maintenir son soutien populaire. Rarement furent-elles prises au sérieux pour ce qu’elles étaient, des engagements solennels qu’il avait bien l’intention de tenir. Les appels lancés par Mussolini à l’établissement d’un nouvel empire italien, et par la suite son alliance avec Hitler, furent également relativisés et traités de bravacheries, voire simplement excusés sous le prétexte que, puisque d’autres pays européens disposaient de territoires outremer, l’Italie en avait également le droit.
Certains universitaires élargirent le champ de leurs recherches afin d’inclure les autres régimes de terreur, comme la Russie de Staline, qui assassina aussi systématiquement des millions de personnes et dont les ambitions menacèrent aussi l’Occident. Comme pour le fascisme, les contemporains de ces régimes n’arrivèrent pas admettre que l’Archipel du Goulag était bien ce qu’il était. Et comme pour le fascisme, ces régimes furent étudiés intensément afin qu’à l’avenir nous verrions clairement le mal assez tôt pour l’empêcher de devenir une menace sérieuse. De nos jours il y a très peu de choses que nous ne savons sur ces régimes et ces mouvements.
Nos plus grands historiens et philosophes ont décrit, analysé et chroniqué les guerres qu’ils nous ont livrées. Notre connaissance est considérable comme est sincère et intense notre volonté de les empêcher de se produire à nouveau.
Et pourtant ces menaces ont resurgi, et nous nous comportons tout comme au siècle dernier. Le monde frémit sous les rhétoriques familières et les agressions des mouvements tels qu’Al Kaida et des régimes comme l’Iran khomeyniste ou l’Arabie Saoudite wahhabite, qui promettent de nous détruire, nous et nos semblables. Comme leurs prédécesseurs au siècle dernier, leurs intentions ne sont pas voilées et ils tentent de les mettre en œuvre dès qu’ils en ont la possibilité. Comme nos prédécesseurs nous ne les prenons guère au sérieux et n’agissons pas conséquemment. À nouveau et bien souvent nous relativisons la logique de leurs idées et les conséquences prévisibles de leurs discours et de leurs écrits. Nous ne voulons y voir qu’une version arabe ou islamique de la politique, destinée à des fins essentiellement domestiques.
Il est clair que les explications que nous donnons de nos propres échecs au cours du XXe siècle étaient erronées. L’irruption de mouvements messianiques de masse n’était pas nouvelle et il y a peu de chose que nous ne sachions à leur sujet. Pas plus que n’est une excuse le fait de voir de tels mouvements apparaître dans des pays avec de longues histoires et traditions politiques et culturelles. La question qui s’impose à nouveau est donc, pourquoi somme nous incapables d’apprécier correctement la menace qui prend forme ? Pourquoi prenons-nous nos ennemis, pour de simples dirigeants occidentaux engagés dans la voie de négociations ?
Sans doute y a-t-il plusieurs raisons. La croyance que tous les hommes sont identiques et intrinsèquement bons, même si l’Histoire de l’humanité et particulièrement celle du siècle précédent ne va guère dans ce sens. Certes il est déplaisant d’admettre que des hommes, des peuples, des cultures entières, parfois parmi les plus sophistiquées, peuvent se soumettre au mal et leur obéir. Une grande partie de la culture Occidentale croit profondément que la nature humaine est bonne et est réticente à abandonner ces théories rassurantes. C’est pourquoi nous avons tendance à considérer comme raisonnables même les ennemis dont la déraison fanatique est manifeste.
Il ne s’agit pas là d’une simple question philosophique. Reconnaître la menace qui se profile suppose au choix, de s’abandonner à une politique de suicide national, ou de la combattre sans merci. Comme ce fût le cas au cours du XXe siècle, ce combat implique la guerre. Il implique aussi, qu’au moins temporairement, nous soyons prêts à des sacrifices sur de nombreux points, le confort de nos vies, nos vies mêmes parfois, nos passions domestiques, nos carrières et même certaines Libertés. Surtout nous devons être prêts à investir dans cette lutte une partie de nos richesses. Tous ces sacrifices seront pénibles.
Il y a aussi l’antisémitisme. Les vieux bréviaires de la haine, comme Les Protocoles des Sages de Sion, sont édités désormais en persan et en arabe, disséminés dans tout le Moyen-Orient. Des appels à la destruction des Juifs sont régulièrement diffusés sur les télévisions iraniennes, égyptiennes, saoudites, syriennes, et sont même répétés dans les mosquées européennes et américaines. Il y a peu de condamnations de la part de l’Occident et pratiquement aucune action n’est entreprise, comme si l’Occident retrouvait une indifférence naguère familière envers le sort des Juifs.
Finalement il y a la nature même de notre système politique. Aucune démocratie ne se prépara vraiment à la guerre avant de la subir au cours des années 40. Aucune n’était préparée à l’assaut terroriste du XXIe siècle. La nature de la politique en Occident rend très difficile aux dirigeants de chaque pays, même à ceux dont la clairvoyance les met au-dessus du lot, de prendre en temps utile les décisions préventives. Des dirigeants comme Churchill furent renvoyés à l'opposition jusqu'au moment où la guerre devint inévitable. Franklin Delano Roosevelt eut à combattre désespérément pour obtenir du Congrès le vote de la conscription, quelques mois à peine avant Pearl Harbour.
Aujourd’hui comme hier, c’est l’ennemi qui a l’initiative. Même désormais alors que nous sommes engagés sur les théâtres Irakiens et Afghans, peu admettent que nous sommes attaqués par un ennemi semblable à ceux d’hier. Encore moins d’entre nous sont prêts à agir en conséquence. Mais cette fois l’ignorance ne saurait nous excuser. Si nous sommes vaincus ce sera par manque de volonté et non de connaissances. Ce fût déjà le cas lorsque nous fûmes au bord du gouffre en 1940."
Ce site est dédié aux millions d'Européens qui, malgré d'incessantes campagnes de désinformation, ne croient pas que les Juifs ne sont capables que du pire; ne dissimulent pas leur antisémitisme dans le langage de l'antisionisme; et savent qu'Israël représente ce qu'il y a de meilleur dans une démocratie.
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